Pour Lucie Delaporte de Mediapart, Vincent Peillon entame des négociations syndicales avec "une FSU très affaiblie".

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Refonder l’école: avec, sans ou contre les syndicats?
12 octobre 2012 | Par Lucie Delaporte
Vincent Peillon recevra la semaine prochaine les organisations syndicales pour une phase de consultation. Largement tenues à l'écart de la concertation qui vient de s'achever, les organisations syndicales restent incontournables, malgré un paysage syndical en profonde recomposition et une FSU très affaiblie.

Compte rendu de l'article (accès payant)

Résumé : La FSU est, objectivement, le syndicat majoritaire des personnels d'enseignement. Mais pour Lucie Delaporte, ça n'a strictement aucune importance, et c'est bien dommage que le ministre consulte cette fédération. En effet :
- elle trouve que la FSU est en déclin,
- un adhérent interrogé pense que le Snes dit trop souvent non,
- l'Unsa, le Sgen, la FCPE et l'Afev affirment qu'ils représentent "le bloc majoritaire du changement",
- le Sgen et l'Unsa ont gagné "d'incontestables batailles idéologiques".

Dans le détail, cela donne :

1 - La FSU et la refondation de l'école
1.1. Les concertations lancées par Peillon lundi 15 octobre intègreront la FSU
Lucie Delaporte regrette que "des pistes présentées comme le fruit de consensus" (orientation, réforme de l'évaluation et échanges de professeurs entre primaire et collège) aient été "raillées" par le Snes dans son communiqué de presse : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Elle note que les syndicats enseignants ont été "satellisés" et marginalisés durant la concertation, mais qu'ils restent "incontournables".

1.2. Vincent Peillon doit-il choisir entre le Snes et la refondation ?
La journaliste craint que V. Peillon lâche le rapport face au communiqué mécontent du Snes : introduction de la bivalence, propositions sur l'orientation et réforme du métier d'enseignant seraient repoussées à cause du "syndicat hégémonique" qui "plomberait" encore une fois la refondation.

2 - La FSU serait en déclin, "plus fragile que jamais"
Cependant, il y a de l'espoir ! Lucie Delaporte affirme avoir vu une "profonde mutation du paysage syndical ces dernières années" : selon elle, "la FSU est aussi sans doute plus fragile que jamais."
Pour elle, le déclin de la FSU est patent, et voici les preuves qu'elle apporte :
- le taux de pénétration du Snes est de 21 % dans le second degré (elle ne mentionne pas celui des autres syndicats),
- le taux de participation aux élections professionnelles était de moins de 40% en 2011 (ce qui a donc touché tous les syndicats),
- un anonyme adhérent, interrogé par la journaliste, lui confie cette analyse socio-politique très approfondie sur le syndicalisme français contemporain : "le représentant du Snes, c'est la grande gueule qui est toujours contre tout".

3 - Les grands témoins
Lucie Delaporte est une journaliste innovante : elle a choisi de faire un article sur la FSU sans interroger personne de la FSU, mis à part un étrange adhérent anonyme, et sans doute légèrement schizophrène, puisque sa seule déclaration est une critique courte et infondée de son propre syndicat.

N'ayant interrogé personne du Snes, elle cite ou interroge des gens très objectifs : Thierry Cadart (Sgen), Jean-Jacques Hazan (FCPE) et Christian Chevalier (Unsa). Le jour où Lucie Delaporte enquêtera sur le service public français, elle interrogera uniquement Liliane Bettencourt, David Cameron et Martin Bouygues.

Thierry Cadart (Sgen) est catégorique : "Le syndicat ultramajoritaire ne pèse pas car il n'a pas la capacité de mobiliser les collègues". Cette affirmation d'un syndicat opposé au Snes est aussitôt reprise par la journaliste, qui en fait une vérité évidente : "chacun sait que tout appel à la mobilisation de sa part, comme une grève, serait peu ou pas suivi".

Jean-Jacques Hazan (FCPE) n'a pas de mots assez durs pour condamner le syndicat qui l'empêche de dire aux enseignants comment ils doivent enseigner, sans jamais avoir enseigné lui-même devant une classe. Pour lui, le Snes est « arc-bouté sur ses positions corporatistes ».

Enfin, Christian Chevalier sera interrogé quelques lignes plus loin. Juste avant, Lucie Delaporte rappelle que, si la FSU est bien majoritaire arithmétiquement chez les enseignants (mais c'est un détail relégué entre parenthèses), l'Unsa Education a bien progressé aux dernières élections professionnelles (sans donner plus de précisions). En outre, Sgen et Unsa ont remporté "d'incontestables batailles idéologiques" - ce qui surprend, lorsque l'on sait que la "victoire idéologique" à défaut de la victoire dans les urnes est l'argument favori, depuis quelques années,... du FN ! Il faut espérer qu'il ne s'agit là que d'une coïncidence, et que personne n'en est réduit à aller puiser ses sources d'inspiration dans des partis peu fréquentables.

4 - Après le bloc identitaire, le bloc majoritaire
Joie des coeurs : le « bloc majoritaire du changement » pèse de tout son poids dans le débat public. Ce BMC autoproclamé réunit Sgen, Unsa, FCPE (tous précités) et l'Afev. "Nous avons produit des textes" affirme fièrement Christian Chevalier. Aucun n'a vraiment fait grand chose pour la victoire de François Hollande, mais il semble de bon ton, pour certaines organisations syndicales, d'utiliser le terme "majoritaire" pour masquer le fait qu'elles ne le sont justement pas au sein de leur propre profession...

Pour la journaliste, "sur bien des thèmes, [...] tout ce qui devrait entrer en vigueur dès l’an prochain, ils ont incontestablement eu gain de cause". Tels les chefs grecs qui se répartissent leurs trophées lors du sac de Troie, chacun retrouve sa revendication dans le rapport de la concertation :
- l'AFEV impose l'« école bienveillante »,
- la FCPE décroche la fin des devoirs à la maison,
- le BMC remporte la refonte des rythmes scolaires, l'introduction de pratiques culturelles et sportives par le biais des collectivités locales, et la réforme de la formation des enseignants.

On appréciera à sa juste valeur ce commentaire très objectif de la journaliste : "L’idée défendue par le Snes d’un allongement de la scolarité obligatoire à 18 ans est restée, quant à elle, totalement inaudible". Rappelons que cette idée est certes défendue par le Snes, mais qu'elle est aussi dans le rapport de la concertation - celui-là même que la journaliste présente en début d'article comme empli de "propositions audacieuses" et de pistes qui sont "le fruit de consensus" !

5 - La FSU : combien de divisions ?
Lucie Delaporte finit son article en se mettant très modestement... dans la peau de Vincent Peillon. Pour elle, le ministre est un "habile politique", qui n'agit qu'avec un peu de pitié mais surtout avec beaucoup de ruse en faisant (en apparence !) des concessions à la FSU - un "syndicat fragilisé", nous rappelle-t-elle encore sans le prouver. Pour preuve, elle donne deux citations de Vincent Peillon : « Il n'y a de revanche à prendre sur personne » et « Personne ne doit se sentir humilié ».

Ce "ton particulièrement apaisant du ministre" avait déjà été signalé au début de l'article. Alors, faut-il en conclure que les réactions du Snes auront une influence sur le ministre ? A en croire Lucie Delaporte, elles seront écoutées par l'"habile politique". Mais seront-elles pour autant entendues et prises en compte ? La réponse qu'apporte Lucie Delaporte à cette question est cette fois dans le début de l'article, lorsqu'elle se demandait si le ministre allait reculer "face au syndicat hégémonique" : "Ce serait aussi oublier la profonde mutation du paysage syndical ces dernières années qui rend cette hypothèse en réalité peu crédible".

Il y a longtemps qu'un article aussi peu objectif avait été publié. On a hâte de lire les prochains articles du même genre, nous prouvant tout aussi rigoureusement que Jean-Luc Mélenchon a remporté les élections de 2012, que Laurence Parisot est favorable à une large politique sociale, ou que Mac Donald's est un haut lieu de la gastronomie.

Le 24 octobre 2011, la même journaliste estimait : "Malgré les nouvelles règles de représentativité syndicale, les grands équilibres sont maintenus entre les syndicats d'enseignants aux élections professionnelles“...

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Ah mais cet article d'octobre 2011 est merveilleux !

Octobre 2012 : "ce serait aussi oublier la profonde mutation du paysage syndical ces dernières années" (Lucie Delaporte).

Octobre 2011 : "la recomposition du paysage syndical, attendue par certains, n’a pas vraiment eu lieu" (Lucie Delaporte).

Précision : il n'y a eu aucune nouvelle élection professionnelle dans l'éducation entre ces deux déclarations, et les élections précédentes, qui ont eu lieu en 2008, n'ont elles mêmes pas changé grand chose aux élections de l'automne 2005.

Octobre 2012 : "Autre signe de déclin de la FSU, le taux de participation aux élections professionnelles, certes bien plus élevé que dans le privé, est lui aussi en berne (38,54 % en 2011, contre plus de 62 % en 2008)" (Lucie Delaporte)

Octobre 2011 : "Finalement, le trait le plus marquant de ces élections restera une participation exceptionnellement basse à 38,54% de votants, contre plus de 62% en 2008. Ce qui fait d’ailleurs plonger le taux de l’ensemble de la Fonction publique. En cause, des difficultés techniques dues au vote électronique. Pour Frédérique Rollet, co-secrétaire générale du Snes, majoritaire dans le second degré: "Cette baisse de la participation est liée aux modalités de vote." [...] Pour l’Unsa, qui aurait souhaité reculer le vote à décembre pour laisser le temps de faire campagne, le choix d’octobre, peu après la rentrée, a aussi peut-être joué." (Lucie Delaporte)

La seule solution crédible à une telle réinterprétation des faits, c'est qu'un homonyme lui ait piraté son compte sur Mediapart durant ces derniers jours, non ?

Bravo John !

Elle a un problème inquiétant, cette dame, non ? :shock:

Crédible, "l'analyse" de la dame... :boulet:

C'est une journaliste, ou juste une personne qui participe ponctuellement à médiapart ?

Quelle question ! Tu sais bien que tous les scribouillards sont journalistes d'office, de même que tous les parents sont enseignants, voire inspecteurs !

La journaliste craint que V. Peillon lâche le rapport face au communiqué mécontent du Snes : introduction de la bivalence, propositions sur l'orientation et réforme du métier d'enseignant seraient repoussées à cause du "syndicat hégémonique" qui "plomberait" encore une fois la refondation.

Elle craint que la bivalence des enseignants ne soit repoussée ?? Mais de quoi elle se mèle cette journaliste ?? Et si on lançait la polyvalence des journalistes, tiens ! Désormais, tout journaliste politique devra aussi couvrir le sport, la culture, le people etc...

Lucie Delaporte, dans Mediapart, a écrit:le Sgen et l'Unsa ont gagné "d'incontestables batailles idéologiques".

Nul ne le conteste vraiment. Pour habituer l'opinion à un syndicalisme qui défende le massacre des statuts et le rattachement des syndicats à des partis politiques, et à un parti majoritaire qui s'appuie sur les syndicats minoritaires pour "réformer" (donc pour envoyer à la casse, je le rappelle), il n'y a en effet pas mieux.

Will.T a écrit:C'est une journaliste, ou juste une personne qui participe ponctuellement à médiapart ?

C'est une journaliste spécialisée dans le domaine de l'éducation.

Karine B. a écrit:Bravo John !

+1

John, lui as tu fait parvenir ton analyse?

Le titre de l'article m'avait interpelée, je n'avais pas poussé la porte plus loin en me créant un compte et donc merci à John pour ce compte-rendu et cette analyse.

adrifab a écrit:

La journaliste craint que V. Peillon lâche le rapport face au communiqué mécontent du Snes : introduction de la bivalence, propositions sur l'orientation et réforme du métier d'enseignant seraient repoussées à cause du "syndicat hégémonique" qui "plomberait" encore une fois la refondation.

Elle craint que la bivalence des enseignants ne soit repoussée ?? Mais de quoi elle se mèle cette journaliste ?? Et si on lançait la polyvalence des journalistes, tiens ! Désormais, tout journaliste politique devra aussi couvrir le sport, la culture, le people etc...

Ah non alors, vous ne trouvez pas qu'ils disent assez de Khônneries comme ça ?!

adrifab a écrit:Elle craint que la bivalence des enseignants ne soit repoussée ?? Mais de quoi elle se mèle cette journaliste ?? Et si on lançait la polyvalence des journalistes, tiens ! Désormais, tout journaliste politique devra aussi couvrir le sport, la culture, le people etc...

Il y a un certain journalisme qui, même s'il ne comprend rien, n'hésite pas à parler de tout : c'est le concept bien particulier non pas de polyvalence, mais de nullivalence.

Marcassin a écrit:

adrifab a écrit:Elle craint que la bivalence des enseignants ne soit repoussée ?? Mais de quoi elle se mèle cette journaliste ?? Et si on lançait la polyvalence des journalistes, tiens ! Désormais, tout journaliste politique devra aussi couvrir le sport, la culture, le people etc...

Il y a un certain journalisme qui, même s'il ne comprend rien, n'hésite pas à parler de tout : c'est le concept bien particulier non pas de polyvalence, mais de nullivalence.

:lol!:

Cripure a écrit:

Lucie Delaporte, dans Mediapart, a écrit:le Sgen et l'Unsa ont gagné "d'incontestables batailles idéologiques".

Nul ne le conteste vraiment. Pour habituer l'opinion à un syndicalisme qui défende le massacre des statuts et le rattachement des syndicats à des partis politiques, et à un parti majoritaire qui s'appuie sur les syndicats minoritaires pour "réformer" (donc pour envoyer à la casse, je le rappelle), il n'y a en effet pas mieux.

Cripure a écrit:

Lucie Delaporte, dans Mediapart, a écrit:le Sgen et l'Unsa ont gagné "d'incontestables batailles idéologiques".

Nul ne le conteste vraiment. Pour habituer l'opinion à un syndicalisme qui défende le massacre des statuts et le rattachement des syndicats à des partis politiques, et à un parti majoritaire qui s'appuie sur les syndicats minoritaires pour "réformer" (donc pour envoyer à la casse, je le rappelle), il n'y a en effet pas mieux.

C'est malheureusement le seul point avéré de l'article.
Ils ont idéologiquement gagné.

Le reste est très drôle : ça sent la trouille que les amis de la dame ne réussissent pas a imposer leurs idées.

John a écrit:

Will.T a écrit:C'est une journaliste, ou juste une personne qui participe ponctuellement à médiapart ?

C'est une journaliste spécialisée dans le domaine de l'éducation.

Ce qui est assez dingue, c'est que l'ensemble des journalistes "spécialistes de l'éducation" est très ideologisé (désolé) : l'objectivité ne semble pas exister ds ce monde.
En tous cas, celle-ci, que je ne connaissais pas, est assez énorme : pour compléter ta liste de comparaisons finale, elle me fait penser au porte-parole de Saddam Hussein qui, lors de la 2ème guerre du Golfe, déclarait en direct que l'armée irakienne était en train de détruire les américains, que ceux-ci étaient en déroute etc. pendant qu'à l'extérieur du palais, les chars américains étaient en ville, a bombarder tout ce qui passait.

Ça sent quand même la peur que le changement ne soit pas celui qu'ils escomptaient depuis si longtemps.
Pour Peillon, cela doit qd même avoir un sens que le SNES prenne des positions assez différentes de ce qu'il a défendu pdt des décennies.
Enfin j'espère.

Décevant de mediapart en tous cas.

Prof en campagne a rendu l'article de Lucie Delaporte public :
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Si profencampagne a le droit, on va sans doute pouvoir le faire aussi alors...

Gryphe a écrit:Prof en campagne a rendu l'article de Lucie Delaporte public :
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Cette dame Delaporte (et qui devrait la prendre, y compris dans le museau) confond ses désirs avec la réalité.

John a écrit:Si profencampagne a le droit, on va sans doute pouvoir le faire aussi alors...

Ah, ben je ne sais pas s'il a le droit, mais il l'a pris en tout cas. :lol:

Je sens que les nouveaux concepts de "bloc majoritaire du changement" ou d'"éthique sociale affirmée" vont faire florès pendant cinq ans.