- CondorcetOracle
http://www.laviedesidees.fr/Qui-ecrira-notre-histoire.html
"Jusqu’à aujourd’hui, les archives du ghetto de Varsovie n’étaient connues que des seuls spécialistes. L’historien américain Samuel Kassow nous les présente sous un jour nouveau : l’œuvre d’une équipe dont la mission était de faire entendre le quotidien d’une communauté en cours d’extermination".
"Jusqu’à aujourd’hui, les archives du ghetto de Varsovie n’étaient connues que des seuls spécialistes. L’historien américain Samuel Kassow nous les présente sous un jour nouveau : l’œuvre d’une équipe dont la mission était de faire entendre le quotidien d’une communauté en cours d’extermination".
- NadejdaGrand sage
Je l'avais très rapidement présenté dans le topic des lectures, je crois.
Un livre très précieux (puisqu'en français il reste encore beaucoup à traduire et à faire découvrir). Et très éclairant sur la vie d'Emanuel Ringelblum, de son groupe Oyneg Shabes (« joie du shabat ») formé d'historiens, de sociologues, d'éducateurs, d'écrivains, et sur leur entreprise d'archivage (des tickets de transport aux poèmes d'enfants en passant par des documents administratifs ou des journaux intimes).
Ces archives, les plus importantes réunies au sujet d'un ghetto, constituent un témoignage exceptionnel, non seulement sur l'incroyable production écrite dans les ghettos (tout le monde écrivait, même les enfants), sur les activités qui perduraient même sous la menace, mais aussi sur les différentes stratégies de résistance du peuple juif. Oyneg Shabes fut organisé par un historien soucieux de perpétuer le Zakhor (le "souvenir") mais aussi très lié à un mouvement marxiste révolutionnaire alors que d'autres groupes étaient soit orientés vers les actions sociales soit animés par la Résistance armée (mouvements de jeunesse qui conduisirent en 1943 à l'insurrection du ghetto), soit tournés vers le sauvetage de la tradition juive. On comprend à la lecture du livre que Ringelblum tarda — ce fut peut-être son erreur — à s'engager dans la Résistance et le regretta. De son groupe Oyneg Shabes seuls quatre collaborateurs survécurent à la guerre.
Ce livre m'a permis aussi d'en savoir plus sur un poète dont j'ignorais jusqu'alors l'existence, Wladyslaw Szlengel. Pour les curieux, quelques poèmes en polonais (sa langue d'écriture), parfois traduits en anglais et en hébreu : http://www.zchor.org/szlengel/szlengel.htm C'est, avec le grand poète yiddish Ytshak Katznelson (il faut lire son Chant du peuple juif assassiné !), le plus connu des poètes du ghetto de Varsovie. Pour compléter, le site Poetry in Hell présente en anglais beaucoup de poèmes en yiddish issus des archives : http://poetryinhell.org/
On peut lire aussi une autre recension par Georges Bensoussan : http://www.fondationshoah.org/FMS/IMG/pdf/Le_Monde_des_Livres_-_29_09_2011_-_Kassow.pdf
Un livre très précieux (puisqu'en français il reste encore beaucoup à traduire et à faire découvrir). Et très éclairant sur la vie d'Emanuel Ringelblum, de son groupe Oyneg Shabes (« joie du shabat ») formé d'historiens, de sociologues, d'éducateurs, d'écrivains, et sur leur entreprise d'archivage (des tickets de transport aux poèmes d'enfants en passant par des documents administratifs ou des journaux intimes).
Ces archives, les plus importantes réunies au sujet d'un ghetto, constituent un témoignage exceptionnel, non seulement sur l'incroyable production écrite dans les ghettos (tout le monde écrivait, même les enfants), sur les activités qui perduraient même sous la menace, mais aussi sur les différentes stratégies de résistance du peuple juif. Oyneg Shabes fut organisé par un historien soucieux de perpétuer le Zakhor (le "souvenir") mais aussi très lié à un mouvement marxiste révolutionnaire alors que d'autres groupes étaient soit orientés vers les actions sociales soit animés par la Résistance armée (mouvements de jeunesse qui conduisirent en 1943 à l'insurrection du ghetto), soit tournés vers le sauvetage de la tradition juive. On comprend à la lecture du livre que Ringelblum tarda — ce fut peut-être son erreur — à s'engager dans la Résistance et le regretta. De son groupe Oyneg Shabes seuls quatre collaborateurs survécurent à la guerre.
Ce livre m'a permis aussi d'en savoir plus sur un poète dont j'ignorais jusqu'alors l'existence, Wladyslaw Szlengel. Pour les curieux, quelques poèmes en polonais (sa langue d'écriture), parfois traduits en anglais et en hébreu : http://www.zchor.org/szlengel/szlengel.htm C'est, avec le grand poète yiddish Ytshak Katznelson (il faut lire son Chant du peuple juif assassiné !), le plus connu des poètes du ghetto de Varsovie. Pour compléter, le site Poetry in Hell présente en anglais beaucoup de poèmes en yiddish issus des archives : http://poetryinhell.org/
On peut lire aussi une autre recension par Georges Bensoussan : http://www.fondationshoah.org/FMS/IMG/pdf/Le_Monde_des_Livres_-_29_09_2011_-_Kassow.pdf
- CeladonDemi-dieu
Le Chant du peuple juif assassiné
Poème d'Isaac Katznelson
La peur, l’angoisse, la terreur horrible m’enserrent étroitement.
Les wagons sont là, de nouveau !
Partis hier soir, et de retour aujourd’hui, ils sont là, de nouveau là,
sur le quai.
Tu vois leur gueule ouverte ?
La gueule ouverte dans l’horreur !
Ils en veulent encore !
Encore, de nouveau. Rien ne les rassasie.
Ils sont là, ils attendent les Juifs.
Quand les apporte-t-on ?
Affamés comme s’ils n’avaient encore jamais englouti leur Juif...
Jamais... Mais oui ! ils en veulent encore, toujours plus.
Ils en veulent encore.
Ils sont là, attendant qu’on leur prépare la table,
Qu’on serve le repas, qu’on serve des Juifs autant qu’il en pourra entrer.
Des Juifs !
Vieux peuple aux enfants tout jeunes, jeunes et frais,
Grappes jeunes sur un vieux cep ;
et des vieillards comme le vin fort est vieux.
Ils étaient pleins pourtant, gavés, étouffés de Juifs !
Les morts debout, serrés, coincés entre les vivants,
Les morts debout sans toucher le sol à force d’être serrés,
Sans que l’on puisse voir dans la masse lequel est mort et lequel est vivant.
La tête du mort, comme une tête vivante, se balançait de-ci de-là,
Et sur le vivant coulait déjà la sueur de la mort.
L’enfant réclame à boire à sa mère, morte, une goutte d’eau,
Il lui frappe la tête de ses petites mains, pleurant parce qu’il a chaud.
Wagons vides ! Vous étiez pleins et vous voici vides à nouveau,
Où vous êtes-vous débarrassés de vos Juifs ?
Que leur est-il arrivé ?
Ils étaient dix mille, comptés, enregistrés – et vous voilà revenus ?
Ô dites-moi, wagons, wagons vides, où avez-vous été ?
Vous venez de l’autre monde, je sais, il ne doit pas être loin :
hier à peine vous êtes partis, tout chargés, et
aujourd’hui vous êtes déjà là !
Pourquoi tant de hâte, wagons ?
Avez-vous donc si peu de temps ?
Vous serez bientôt, comme moi, des vieillards,
bientôt brisés et gris.
Voir tout cela, regarder et entendre... Malheur !
Comment pouvez-vous le supporter, même faits de fer et de bois ?
Ô fer, tu étais enfoui dans la terre, profond, ô fer froid.
Et toi, bois, tu poussais, arbre sur la terre, haut et fier !
Et maintenant ? Des wagons, des wagons de marchandises
et vous regardez, témoins muets de cette charge,
Muets, fermés, vous avez vu.
Dites-moi, ô wagons, où menez-vous ce peuple,
ces Juifs emmenés à la mort ?
Ce n’est pas votre faute.
On vous charge,
on vous dit : va !
On vous envoie chargés, on vous ramène vides.
Wagons qui revenez de l’autre monde, parlez, dites un mot,
Faites parlez vos roues, que moi, que moi je pleure...
http://d-d.natanson.pagesperso-orange.fr/poeme_katznelson.htm
Poème d'Isaac Katznelson
La peur, l’angoisse, la terreur horrible m’enserrent étroitement.
Les wagons sont là, de nouveau !
Partis hier soir, et de retour aujourd’hui, ils sont là, de nouveau là,
sur le quai.
Tu vois leur gueule ouverte ?
La gueule ouverte dans l’horreur !
Ils en veulent encore !
Encore, de nouveau. Rien ne les rassasie.
Ils sont là, ils attendent les Juifs.
Quand les apporte-t-on ?
Affamés comme s’ils n’avaient encore jamais englouti leur Juif...
Jamais... Mais oui ! ils en veulent encore, toujours plus.
Ils en veulent encore.
Ils sont là, attendant qu’on leur prépare la table,
Qu’on serve le repas, qu’on serve des Juifs autant qu’il en pourra entrer.
Des Juifs !
Vieux peuple aux enfants tout jeunes, jeunes et frais,
Grappes jeunes sur un vieux cep ;
et des vieillards comme le vin fort est vieux.
Ils étaient pleins pourtant, gavés, étouffés de Juifs !
Les morts debout, serrés, coincés entre les vivants,
Les morts debout sans toucher le sol à force d’être serrés,
Sans que l’on puisse voir dans la masse lequel est mort et lequel est vivant.
La tête du mort, comme une tête vivante, se balançait de-ci de-là,
Et sur le vivant coulait déjà la sueur de la mort.
L’enfant réclame à boire à sa mère, morte, une goutte d’eau,
Il lui frappe la tête de ses petites mains, pleurant parce qu’il a chaud.
Wagons vides ! Vous étiez pleins et vous voici vides à nouveau,
Où vous êtes-vous débarrassés de vos Juifs ?
Que leur est-il arrivé ?
Ils étaient dix mille, comptés, enregistrés – et vous voilà revenus ?
Ô dites-moi, wagons, wagons vides, où avez-vous été ?
Vous venez de l’autre monde, je sais, il ne doit pas être loin :
hier à peine vous êtes partis, tout chargés, et
aujourd’hui vous êtes déjà là !
Pourquoi tant de hâte, wagons ?
Avez-vous donc si peu de temps ?
Vous serez bientôt, comme moi, des vieillards,
bientôt brisés et gris.
Voir tout cela, regarder et entendre... Malheur !
Comment pouvez-vous le supporter, même faits de fer et de bois ?
Ô fer, tu étais enfoui dans la terre, profond, ô fer froid.
Et toi, bois, tu poussais, arbre sur la terre, haut et fier !
Et maintenant ? Des wagons, des wagons de marchandises
et vous regardez, témoins muets de cette charge,
Muets, fermés, vous avez vu.
Dites-moi, ô wagons, où menez-vous ce peuple,
ces Juifs emmenés à la mort ?
Ce n’est pas votre faute.
On vous charge,
on vous dit : va !
On vous envoie chargés, on vous ramène vides.
Wagons qui revenez de l’autre monde, parlez, dites un mot,
Faites parlez vos roues, que moi, que moi je pleure...
http://d-d.natanson.pagesperso-orange.fr/poeme_katznelson.htm
- NadejdaGrand sage
Samuel Kassow parlera de ces archives le 28 novembre à 19h au Mémorial de la Shoah
La rencontre sera animée par Jean-Charles Szurek, directeur de recherche au CNRS.
En partenariat avec l’Institut polonais de Paris
Tarifs : 5 euros / réduit 3 euros
La rencontre sera animée par Jean-Charles Szurek, directeur de recherche au CNRS.
En partenariat avec l’Institut polonais de Paris
Tarifs : 5 euros / réduit 3 euros
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