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- FantômetteHabitué du forum
Merci. Je diffuse. Il faut lutter contre l'oubli.
- MarieLNeoprof expérimenté
Je ne sais si vous en avez eu connaissance...
http://www.ac-montpellier.fr/sections/actualites/academie-endeuillee
http://www.ac-montpellier.fr/sections/actualites/academie-endeuillee
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Je suis ce que je suis et je suis l'être même, je suis ma volonté en moi-même exaucée - A. Kalda
- Palombella RossaNeoprof expérimenté
Abraxas a écrit:Pour ne pas oublier tout de suite :
http://bonnetdane.midiblogs.com/archive/2011/11/02/en-memoire-de-lise.html
Merci.
J'envoie illico sur le groupe faceBook "on achève bien les profs"
- Thalia de GMédiateur
J'ai lu l'article du blog. Je n'ose poster de commentaire, je n'ai pas la plume des de certains visiteurs.
Sinon, j'aurais témoigné que même dans mon collège bc bg, je sens la tension monter. Profs - dont moi - déboussolés par des directives que nous ne sentons pas pertinentes, le trio infernal du B2i, de l'hida et du Socle - et élèves qui redressent la tête et sont de plus en plus sûrs de leurs droits, sauf celui d'apprendre.
Je ne parlerai pas de l'orientation parfois dénuée de sens qui nous fait envoyer en 2nde GT des élèves qui s'y casseront joyeusement la figure. De cela j'ai honte, même si je ne suis pas coupable.
Sinon, j'aurais témoigné que même dans mon collège bc bg, je sens la tension monter. Profs - dont moi - déboussolés par des directives que nous ne sentons pas pertinentes, le trio infernal du B2i, de l'hida et du Socle - et élèves qui redressent la tête et sont de plus en plus sûrs de leurs droits, sauf celui d'apprendre.
Je ne parlerai pas de l'orientation parfois dénuée de sens qui nous fait envoyer en 2nde GT des élèves qui s'y casseront joyeusement la figure. De cela j'ai honte, même si je ne suis pas coupable.
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- SicretteNiveau 10
Axel a écrit:Je ne sais si vous en avez eu connaissance...
http://www.ac-montpellier.fr/sections/actualites/academie-endeuillee
Et bien voilà, affaire classée: "c'est pas not' faute Msieur, nous on était là!"
Au suivant...
- AbraxasDoyen
Thalia de G a écrit:J'ai lu l'article du blog. Je n'ose poster de commentaire, je n'ai pas la plume des de certains visiteurs.
Sinon, j'aurais témoigné que même dans mon collège bc bg, je sens la tension monter. Profs - dont moi - déboussolés par des directives que nous ne sentons pas pertinentes, le trio infernal du B2i, de l'hida et du Socle - et élèves qui redressent la tête et sont de plus en plus sûrs de leurs droits, sauf celui d'apprendre.
Je ne parlerai pas de l'orientation parfois dénuée de sens qui nous fait envoyer en 2nde GT des élèves qui s'y casseront joyeusement la figure. De cela j'ai honte, même si je ne suis pas coupable.
Mais il faut témoigner ! Pourquoi diable auriez-vous des hésitations à poster sur un blog où par définition personne ne connaît Thalia de G — comme le point du même nom ?
- LMVénérable
Moi ce qui ruine le moral, c'est qu'aucun collègue ne se sente "déboussolé" comme tu le dis si bien Thalia de G (dans mon établissement). Tout est accepté, tout est fait, surtout ne parlons de rien...
Personne, je dis bien personne, n'a parlé du décès de Lise Bonnafoux alors que j'ai évoqué le sujet à plusieurs reprises, lancé quelques remarques bien placées. RIEN.
Les collègues qui vont mal, le B2i, nos conditions de travail...rien n'est plus important que...les EDT des profs. Ah! ça...on en parle beaucoup...
Je suis écoeurée.
Personne, je dis bien personne, n'a parlé du décès de Lise Bonnafoux alors que j'ai évoqué le sujet à plusieurs reprises, lancé quelques remarques bien placées. RIEN.
Les collègues qui vont mal, le B2i, nos conditions de travail...rien n'est plus important que...les EDT des profs. Ah! ça...on en parle beaucoup...
Je suis écoeurée.
- Palombella RossaNeoprof expérimenté
LM a écrit: Les collègues qui vont mal, le B2i, nos conditions de travail...rien n'est plus important que...les EDT des profs. Ah! ça...on en parle beaucoup... Je suis écoeurée.
Les emplois du temps, c'est important de fait, et "tonner contre" le montre bien : si l'enseignant lambda venait travailler volontiers, il se focaliserait beaucoup moins sur ces choses-là.
La tendance "je fais mon cours et je me casse" devient dominante, parce que beaucoup de collègues ont tout simplement perdu l'envie.
Quand j'étais jeune, j'ai animé, pendant des années et quasi bénévolement (quelques HSE symboliques en fin d'année) le club théâtre de mon petit lycée de Vendée. Avec d'autres professeurs, je me suis occupée du journal de ce même lycée. J'ai organisé des voyages scolaires en Italie et en Grèce, etc. Tout ceci bénévolement et parfois même à mes frais.
Je constate aujourd'hui que, à quelques exceptions près, tout cet élan a disparu. Les professeurs n'ont pas plus envie d'aller à l'école que les élèves. Ce n'est pas un reproche, c'est un constat. L'école est devenu un lieu où tout le monde va mal ; on (P. Gumbel and co) nous casse la tête avec des élèves en souffrance -- alors qu'ils sont surtout, pour la plupart, épuisés de ne rien faire -- mais ce sont aussi et peut-être surtout les enseignants qui le sont.
Seulement, il ne faut pas le dire. Et comme, pour qu'ils aillent mieux, on va les passer aux 35 h et au travail en équipe obligatoire, tout sera ipso facto réglé.
La tendance "je fais mon cours et je me casse" devient dominante, parce que beaucoup de collègues ont tout simplement perdu l'envie.
Quand j'étais jeune, j'ai animé, pendant des années et quasi bénévolement (quelques HSE symboliques en fin d'année) le club théâtre de mon petit lycée de Vendée. Avec d'autres professeurs, je me suis occupée du journal de ce même lycée. J'ai organisé des voyages scolaires en Italie et en Grèce, etc. Tout ceci bénévolement et parfois même à mes frais.
Je constate aujourd'hui que, à quelques exceptions près, tout cet élan a disparu. Les professeurs n'ont pas plus envie d'aller à l'école que les élèves. Ce n'est pas un reproche, c'est un constat. L'école est devenu un lieu où tout le monde va mal ; on (P. Gumbel and co) nous casse la tête avec des élèves en souffrance -- alors qu'ils sont surtout, pour la plupart, épuisés de ne rien faire -- mais ce sont aussi et peut-être surtout les enseignants qui le sont.
Seulement, il ne faut pas le dire. Et comme, pour qu'ils aillent mieux, on va les passer aux 35 h et au travail en équipe obligatoire, tout sera ipso facto réglé.
- Thalia de GMédiateur
Abraxas a écrit:
Mais il faut témoigner ! Pourquoi diable auriez-vous des hésitations à poster sur un blog où par définition personne ne connaît Thalia de G — comme le point du même nom ?
- Spoiler:
- non, comme Grenoble
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- FantômetteHabitué du forum
LM a écrit:Moi ce qui ruine le moral, c'est qu'aucun collègue ne se sente "déboussolé" comme tu le dis si bien Thalia de G (dans mon établissement). Tout est accepté, tout est fait, surtout ne parlons de rien...
Personne, je dis bien personne, n'a parlé du décès de Lise Bonnafoux alors que j'ai évoqué le sujet à plusieurs reprises, lancé quelques remarques bien placées. RIEN.
Les collègues qui vont mal, le B2i, nos conditions de travail...rien n'est plus important que...les EDT des profs. Ah! ça...on en parle beaucoup...
Je suis écoeurée.
Idem.
- pkHabitué du forum
Elle s'appelait Lise Bonnafous, Copé n'a rien besoin de dire, il n'y a plus qu'un parti politique qui en parle. http://lepcf.fr/Elle-s-appelait-Lise-Bonnafous
Concernant les conditions de travail, retour de l'intervention de l'ACHM:
http://lepcf.fr/Synthese-de-l-intervention-d
Concernant les conditions de travail, retour de l'intervention de l'ACHM:
http://lepcf.fr/Synthese-de-l-intervention-d
- JohnMédiateur
L'article du PCF date du 2 novembre.
Je ne crois pas qu'ils en ont reparlé depuis.
Je ne crois pas qu'ils en ont reparlé depuis.
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"Qui a construit Thèbes aux sept portes ? Dans les livres, on donne les noms des Rois. Les Rois ont-ils traîné les blocs de pierre ? [...] Quand la Muraille de Chine fut terminée, Où allèrent ce soir-là les maçons ?" (Brecht)
"La nostalgie, c'est plus ce que c'était" (Simone Signoret)
- pkHabitué du forum
Le 12 novembre, il traite encore des conditions de travail dans l'EN. En tout cas, à tous ceux qui pensent que le suicide est une décision noble pour défendre une cause, renoncez. Il n'y a pas eu de printemps dans l'EN, les états d'âme des enseignants, les médias et les politiques s'en tapent.
- ThalieGrand sage
Le 19/10/2011
Aux journalistes, politiques, syndicalistes qui voudront bien se faire l’écho de la détresse, de la colère et non du “malaise” de notre profession. Par avance. merci.
“Je le fais pour vous…” … a dit notre collègue, Lise B. professeur de Béziers, qui, en proie à un désespoir absolu, s’est immolée dans la cour de son lycée. Qui, “vous” ?
Vous, chers élèves, dont je ne cherche pas à me faire aimer avant toute chose, car je veux rester sourde à la cote d’amour censée mesurer ma valeur au sein de la “communauté éducative”. Vous ne serez jamais, pour moi, “les gamins” dont il est question dans les salles des “profs”, car je ne serai jamais ni votre mère, ni votre copine. Mais savez-vous encore la différence entre un professeur, une mère et une copine ?
Oui, je continuerai à réclamer le silence en début de cours et à vous laisser debout tant qu’il ne sera pas de qualité. Ce n’est pas là volonté militariste de vous humilier, mais condition nécessaire à mon enseignement : délimitation d’un espace, la classe, où l’on doit entendre la parole d’autrui : celle des grands auteurs dont les textes que nous lisons font entendre la voix, respect de la mienne, simple passeuse de savoir, chargée de structurer votre parole, afin que vous puissiez, à votre tour, vous faire entendre et être pris au sérieux, respect de la voix de vos camarades qui s’exercent à formuler leur pensée. Mais veut-on encore vous apprendre à penser ?
Oui, je continuerai à faire la chasse aux portables et aux I-Pods en cours pour les mêmes raisons.
Oui, je sanctionnerai, autant que mes forces me le permettront – mais il ne faut préjuger de rien, l’usure gagne – vos retards systématiques, votre désinvolture, vos comportements égocentriques, insolents, agressifs et insultants, car je suis un être humain, nanti d’un système nerveux qui n’est pas à toute épreuve, mais conserve le sens de la dignité, de la mienne comme de la vôtre.
Non, je ne ferai pas de stage pour apprendre à “gérer les conflits” et mon propre stress, comme si des ficelles psycho-techniques pouvaient se substituer à la loi qui doit être appliquée, à l’ordre que l’institution doit avant tout garantir, afin de nous protéger vous et moi contre tout acte de violence verbale ou physique, condition sine qua non pour commencer à pouvoir travailler. Non, le “prof” n’est pas un outil qu’on doit rendre plus performant pour vous mater, vous manipuler ou vous séduire.
Non, je ne négocierai pas mes notes, malgré les pressions : celles de l’administration qui sait si bien faire porter la responsabilité d’une moyenne de classe trop basse au professeur, toujours trop exigeant et trop sévère ; celle de nos inspecteurs qui nous “invitent à l’indulgence” dans les commissions d’harmonisation du Brevet et du Bac et nous enjoignent de revenir sur les copies aux notes trop basses ; celles de vos parents qui, dans leur grande majorité, s’alarment à la première de vos faiblesses et me font savoir que “l’année dernière, ça marchait pourtant si bien avec M. Machin” (lequel n’hésitait pas, pour avoir la paix, à surnoter de la manière la plus démagogique qui soit) ; et celles que vous-mêmes savez si bien exercer sur les “adultes” d’aujourd’hui, plus prompts à laisser faire, à négocier des contrats, qu’à faire respecter des règles, sans faiblir – sachant qu’ils n’en tireront jamais aucune gratification immédiate – et qui semblent devenus incapables de supporter cette frustration inhérente à leur fonction d’enseignant et maintenant d’éducateur. Non, je ne me transformerai pas en animatrice de MJC , pour ne pas “vous prendre la tête”, ou parce que apprendre et travailler vous “gave”."Vous" ? Vous, chers collègues, broyés un peu plus chaque jour par une institution qui ne vous protège plus, en dépit de l’article 11 du code de la Fonction Publique qui est encore censé protéger le fonctionnaire contre les outrages ou délits exercés à son encontre dans l’exercice de ses fonctions.
Vous qui jonglez désespérément avec les impératifs de vos programmes qu’il vous faut boucler impérativement dans l’année, mais que l’on vous enjoint d’adapter à chacun de vos élèves dont les niveaux sont, d’une année sur l’autre, plus disparates au sein d’une même classe (puisque les plus perdus passent dans la classe supérieure “au bénéfice de l’âge” ou malgré l’avis des professeurs).
Vous qui vous efforcez de maintenir encore les apparences, alors que tout le système est fissuré ; vous qui direz au conseil de classe : “ Tout va très bien Madame la Marquise” ou “ Avec moi ça se passe bien”, alors que vous pouvez, sans guère vous tromper, annoncer en début d’année, qui sera reçu ou non au Brevet, car les jeux sont faits en septembre et que, pour l’essentiel, vos cours sont devenus très souvent une garderie culturelle où vous tentez de maintenir laborieusement une relative paix sociale, en limitant vos exigences, en surnotant, en renonçant un peu plus chaque jour à transmettre ce que vous avez reçu, car “l’enfant, au centre du système, doit construire lui-même son savoir”, choisir ses matières, ses options, pour un projet devenu essentiellement professionnel. Les valeurs humanistes qui vous ont structurés sont chaque jour un peu plus bafouées au sommet de l’Etat. Il s’agit maintenant d’évaluer des compétences à travers des grilles d’évaluation fabriquées par et pour l’entreprise, au niveau européen, compétences dites souvent transversales qui n’ont plus rien à voir avec l’acquisition de savoirs exigeants dans des disciplines bien précises. Le livret de compétences doit garantir “l’employabilité future” de ceux qui sortiront du système sans diplôme national reconnu et sans qualifications.
Vous, les professeurs d’Humanités (latin et grec) dont il est de bon ton de ridiculiser vos enseignements, que l’on s’est employé à reléguer très tôt ou très tard dans la journée du collégien ou du lycéen, de manière à faire chuter inexorablement les effectifs ; vous qui transmettez les fondements de notre culture et qu’on met en concurrence en 3ème avec l’option DP3, découverte de l’entreprise… Vous qui enseignez une option que nos élèves-consommateurs peuvent essayer au gré de leur fantaisie et abandonner sur une simple lettre de parents qui obtiendra l’arrêt souhaité, pour peu que les notes de latin du chérubin ne lui fassent baisser sa moyenne. Vous qui vous sentez responsables, voire coupables, du désintérêt que ces matières suscitent, vous à qui vos inspecteurs-formateurs suggèrent de rendre vos cours plus attractifs (sorties, jeux, Olympiades…) tout en vous sommant de vous conformer aux Instructions Officielles qui ne transigent pas avec les connaissances grammaticales à acquérir .Vous dont les classes ne doivent jamais s’ennuyer ! Vous qui êtes, même aux yeux de vos collègues, le prof ringard qui persiste à enseigner des savoirs désuets et inutiles et qui ne devrait pas se plaindre…vu ses effectifs réduits.
Vous qui vieillissez, vous qui vous fatiguez plus vite, vous qui êtes maintenant une loque en fin de journée, lasse du bruit et des tensions incessantes, à qui le système demande désormais de rendre compte chaque jour, sur un cahier de textes numérique, de ce que vous avez fait en classe, heure par heure ; vous que Big Brother place ainsi sous le contrôle permanent de vos supérieurs et des parents d’élèves ; vous qui pourrez dorénavant recevoir chaque soir, chez vous, des mails d’élèves, ou de leurs parents, jugeant normal de vous interpeller par écrit et attendant bien sûr de vous la réponse rapide qui leur est due. Vous qu’on flique honteusement comme on ne le fait pour aucune profession.
Vous à qui la société entière peut ainsi demander des comptes à tout moment ; vous qu’on livre à toutes les pressions aisément imaginables et qu’on place dans la situation de devoir vous justifier, de vous défendre sans cesse, car vous êtes devenu le fonctionnaire, bouc-émissaire par excellence, livré régulièrement en pâture à l’opinion publique.
Vous qui en perdez le sommeil ; vous qui ne pouvez travailler avec ce couteau sous la gorge, vous qui tentez de reconstruire chaque soir une image acceptable de vous-même au travail avant de vous en remettre au somnifère ou à l’anxiolytique qui vous permettra, enfin, de dormir, car vous ne pouvez imaginer tenir vos classes demain sans ces heures de sommeil. Vous qui travaillez en apnée entre ces périodes de vacances que tous vous envient et vous reprochent, ultimes bouées qui vous permettent de vous reconstituer avant de découvrir, à chaque rentrée, que la situation se détériore irrémédiablement et que vous êtes, vous, professeur, jeune ou vieux, en première ligne chaque jour, de moins en moins sûr de tenir, si une volonté politique ne rappelle pas, très vite à chacun (parent, élève, professeur) la place qui devrait être la sienne dans une institution laïque et républicaine, si elle ne vous rend pas de toute urgence votre dignité, votre autorité, et des conditions de travail et de salaire décentes.
Vous, parents, élèves, professeurs, qui espérez qu’on tirera une leçon du sacrifice de notre collègue…Quelle leçon ? Telle est la question !
M.C. Perrin-Faivre, professeur de Lettres à Nancy.
Aux journalistes, politiques, syndicalistes qui voudront bien se faire l’écho de la détresse, de la colère et non du “malaise” de notre profession. Par avance. merci.
“Je le fais pour vous…” … a dit notre collègue, Lise B. professeur de Béziers, qui, en proie à un désespoir absolu, s’est immolée dans la cour de son lycée. Qui, “vous” ?
Vous, chers élèves, dont je ne cherche pas à me faire aimer avant toute chose, car je veux rester sourde à la cote d’amour censée mesurer ma valeur au sein de la “communauté éducative”. Vous ne serez jamais, pour moi, “les gamins” dont il est question dans les salles des “profs”, car je ne serai jamais ni votre mère, ni votre copine. Mais savez-vous encore la différence entre un professeur, une mère et une copine ?
Oui, je continuerai à réclamer le silence en début de cours et à vous laisser debout tant qu’il ne sera pas de qualité. Ce n’est pas là volonté militariste de vous humilier, mais condition nécessaire à mon enseignement : délimitation d’un espace, la classe, où l’on doit entendre la parole d’autrui : celle des grands auteurs dont les textes que nous lisons font entendre la voix, respect de la mienne, simple passeuse de savoir, chargée de structurer votre parole, afin que vous puissiez, à votre tour, vous faire entendre et être pris au sérieux, respect de la voix de vos camarades qui s’exercent à formuler leur pensée. Mais veut-on encore vous apprendre à penser ?
Oui, je continuerai à faire la chasse aux portables et aux I-Pods en cours pour les mêmes raisons.
Oui, je sanctionnerai, autant que mes forces me le permettront – mais il ne faut préjuger de rien, l’usure gagne – vos retards systématiques, votre désinvolture, vos comportements égocentriques, insolents, agressifs et insultants, car je suis un être humain, nanti d’un système nerveux qui n’est pas à toute épreuve, mais conserve le sens de la dignité, de la mienne comme de la vôtre.
Non, je ne ferai pas de stage pour apprendre à “gérer les conflits” et mon propre stress, comme si des ficelles psycho-techniques pouvaient se substituer à la loi qui doit être appliquée, à l’ordre que l’institution doit avant tout garantir, afin de nous protéger vous et moi contre tout acte de violence verbale ou physique, condition sine qua non pour commencer à pouvoir travailler. Non, le “prof” n’est pas un outil qu’on doit rendre plus performant pour vous mater, vous manipuler ou vous séduire.
Non, je ne négocierai pas mes notes, malgré les pressions : celles de l’administration qui sait si bien faire porter la responsabilité d’une moyenne de classe trop basse au professeur, toujours trop exigeant et trop sévère ; celle de nos inspecteurs qui nous “invitent à l’indulgence” dans les commissions d’harmonisation du Brevet et du Bac et nous enjoignent de revenir sur les copies aux notes trop basses ; celles de vos parents qui, dans leur grande majorité, s’alarment à la première de vos faiblesses et me font savoir que “l’année dernière, ça marchait pourtant si bien avec M. Machin” (lequel n’hésitait pas, pour avoir la paix, à surnoter de la manière la plus démagogique qui soit) ; et celles que vous-mêmes savez si bien exercer sur les “adultes” d’aujourd’hui, plus prompts à laisser faire, à négocier des contrats, qu’à faire respecter des règles, sans faiblir – sachant qu’ils n’en tireront jamais aucune gratification immédiate – et qui semblent devenus incapables de supporter cette frustration inhérente à leur fonction d’enseignant et maintenant d’éducateur. Non, je ne me transformerai pas en animatrice de MJC , pour ne pas “vous prendre la tête”, ou parce que apprendre et travailler vous “gave”."Vous" ? Vous, chers collègues, broyés un peu plus chaque jour par une institution qui ne vous protège plus, en dépit de l’article 11 du code de la Fonction Publique qui est encore censé protéger le fonctionnaire contre les outrages ou délits exercés à son encontre dans l’exercice de ses fonctions.
Vous qui jonglez désespérément avec les impératifs de vos programmes qu’il vous faut boucler impérativement dans l’année, mais que l’on vous enjoint d’adapter à chacun de vos élèves dont les niveaux sont, d’une année sur l’autre, plus disparates au sein d’une même classe (puisque les plus perdus passent dans la classe supérieure “au bénéfice de l’âge” ou malgré l’avis des professeurs).
Vous qui vous efforcez de maintenir encore les apparences, alors que tout le système est fissuré ; vous qui direz au conseil de classe : “ Tout va très bien Madame la Marquise” ou “ Avec moi ça se passe bien”, alors que vous pouvez, sans guère vous tromper, annoncer en début d’année, qui sera reçu ou non au Brevet, car les jeux sont faits en septembre et que, pour l’essentiel, vos cours sont devenus très souvent une garderie culturelle où vous tentez de maintenir laborieusement une relative paix sociale, en limitant vos exigences, en surnotant, en renonçant un peu plus chaque jour à transmettre ce que vous avez reçu, car “l’enfant, au centre du système, doit construire lui-même son savoir”, choisir ses matières, ses options, pour un projet devenu essentiellement professionnel. Les valeurs humanistes qui vous ont structurés sont chaque jour un peu plus bafouées au sommet de l’Etat. Il s’agit maintenant d’évaluer des compétences à travers des grilles d’évaluation fabriquées par et pour l’entreprise, au niveau européen, compétences dites souvent transversales qui n’ont plus rien à voir avec l’acquisition de savoirs exigeants dans des disciplines bien précises. Le livret de compétences doit garantir “l’employabilité future” de ceux qui sortiront du système sans diplôme national reconnu et sans qualifications.
Vous, les professeurs d’Humanités (latin et grec) dont il est de bon ton de ridiculiser vos enseignements, que l’on s’est employé à reléguer très tôt ou très tard dans la journée du collégien ou du lycéen, de manière à faire chuter inexorablement les effectifs ; vous qui transmettez les fondements de notre culture et qu’on met en concurrence en 3ème avec l’option DP3, découverte de l’entreprise… Vous qui enseignez une option que nos élèves-consommateurs peuvent essayer au gré de leur fantaisie et abandonner sur une simple lettre de parents qui obtiendra l’arrêt souhaité, pour peu que les notes de latin du chérubin ne lui fassent baisser sa moyenne. Vous qui vous sentez responsables, voire coupables, du désintérêt que ces matières suscitent, vous à qui vos inspecteurs-formateurs suggèrent de rendre vos cours plus attractifs (sorties, jeux, Olympiades…) tout en vous sommant de vous conformer aux Instructions Officielles qui ne transigent pas avec les connaissances grammaticales à acquérir .Vous dont les classes ne doivent jamais s’ennuyer ! Vous qui êtes, même aux yeux de vos collègues, le prof ringard qui persiste à enseigner des savoirs désuets et inutiles et qui ne devrait pas se plaindre…vu ses effectifs réduits.
Vous qui vieillissez, vous qui vous fatiguez plus vite, vous qui êtes maintenant une loque en fin de journée, lasse du bruit et des tensions incessantes, à qui le système demande désormais de rendre compte chaque jour, sur un cahier de textes numérique, de ce que vous avez fait en classe, heure par heure ; vous que Big Brother place ainsi sous le contrôle permanent de vos supérieurs et des parents d’élèves ; vous qui pourrez dorénavant recevoir chaque soir, chez vous, des mails d’élèves, ou de leurs parents, jugeant normal de vous interpeller par écrit et attendant bien sûr de vous la réponse rapide qui leur est due. Vous qu’on flique honteusement comme on ne le fait pour aucune profession.
Vous à qui la société entière peut ainsi demander des comptes à tout moment ; vous qu’on livre à toutes les pressions aisément imaginables et qu’on place dans la situation de devoir vous justifier, de vous défendre sans cesse, car vous êtes devenu le fonctionnaire, bouc-émissaire par excellence, livré régulièrement en pâture à l’opinion publique.
Vous qui en perdez le sommeil ; vous qui ne pouvez travailler avec ce couteau sous la gorge, vous qui tentez de reconstruire chaque soir une image acceptable de vous-même au travail avant de vous en remettre au somnifère ou à l’anxiolytique qui vous permettra, enfin, de dormir, car vous ne pouvez imaginer tenir vos classes demain sans ces heures de sommeil. Vous qui travaillez en apnée entre ces périodes de vacances que tous vous envient et vous reprochent, ultimes bouées qui vous permettent de vous reconstituer avant de découvrir, à chaque rentrée, que la situation se détériore irrémédiablement et que vous êtes, vous, professeur, jeune ou vieux, en première ligne chaque jour, de moins en moins sûr de tenir, si une volonté politique ne rappelle pas, très vite à chacun (parent, élève, professeur) la place qui devrait être la sienne dans une institution laïque et républicaine, si elle ne vous rend pas de toute urgence votre dignité, votre autorité, et des conditions de travail et de salaire décentes.
Vous, parents, élèves, professeurs, qui espérez qu’on tirera une leçon du sacrifice de notre collègue…Quelle leçon ? Telle est la question !
M.C. Perrin-Faivre, professeur de Lettres à Nancy.
- Thalia de GMédiateur
Retour sur le décès de Lise
http://www.franceinter.fr/emission-l-invite-michel-serres
Michel Serres en parle comme d'un événement majeur de l'année 2011.
Il rappelle les paroles du père de Lise, elle voulait refonder l'école, réaffirme la difficulté croissante de transmettre, le problème est essentiellement à l'école primaire et dans le secondaire.
Et il parle de Lise en disant "notre amie".
Merci à lui.
http://www.franceinter.fr/emission-l-invite-michel-serres
Michel Serres en parle comme d'un événement majeur de l'année 2011.
Il rappelle les paroles du père de Lise, elle voulait refonder l'école, réaffirme la difficulté croissante de transmettre, le problème est essentiellement à l'école primaire et dans le secondaire.
Et il parle de Lise en disant "notre amie".
Merci à lui.
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Le printemps a le parfum poignant de la nostalgie, et l'été un goût de cendres.
Soleil noir de mes mélancolies.
- DHMonarque
Evénement majeur mais auss LE tabou majeur de 2011
- IphigénieProphète
Je l'ai entendu aussi.Mais cela dit il n'en a pas dit grand chose de plus.
- ErgoDevin
Et des années plus tard...
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"You went to a long-dead octopus for advice, and you're going to blame *me* for your problems?" -- Once Upon a Time
"The gull was your ordinary gull." -- Wittgenstein's Mistress
« Cède, cède, cède, je le veux ! » écrivait Ronin, le samouraï. (Si vous cherchez un stulo-plyme, de l'encre, récap de juillet 2024)
- RogerMartinBon génie
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Yo, salut ma bande ! disait toujours le Samouraï.
I User5899.
User 17706 s'est retiré à Helsingør.
Strange how paranoia can link up with reality now and then.
- Marie LaetitiaBon génie
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Si tu crois encore qu'il nous faut descendre dans le creux des rues pour monter au pouvoir, si tu crois encore au rêve du grand soir, et que nos ennemis, il faut aller les pendre... Aucun rêve, jamais, ne mérite une guerre. L'avenir dépend des révolutionnaires, mais se moque bien des petits révoltés. L'avenir ne veut ni feu ni sang ni guerre. Ne sois pas de ceux-là qui vont nous les donner (J. Brel, La Bastille)
Antigone, c'est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. [...] Elle pense qu'elle va mourir, qu'elle est jeune et qu'elle aussi, elle aurait bien aimé vivre. Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone et il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au bout...
Et on ne dit pas "voir(e) même" mais "voire" ou "même".
- henrietteMédiateur
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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- IphigénieProphète
Voilà : à lire et relire, hélas !Thalie a écrit:Le 19/10/2011
Aux journalistes, politiques, syndicalistes qui voudront bien se faire l’écho de la détresse, de la colère et non du “malaise” de notre profession. Par avance. merci.
“Je le fais pour vous…” … a dit notre collègue, Lise B. professeur de Béziers, qui, en proie à un désespoir absolu, s’est immolée dans la cour de son lycée. Qui, “vous” ?
Vous, chers élèves, dont je ne cherche pas à me faire aimer avant toute chose, car je veux rester sourde à la cote d’amour censée mesurer ma valeur au sein de la “communauté éducative”. Vous ne serez jamais, pour moi, “les gamins” dont il est question dans les salles des “profs”, car je ne serai jamais ni votre mère, ni votre copine. Mais savez-vous encore la différence entre un professeur, une mère et une copine ?
Oui, je continuerai à réclamer le silence en début de cours et à vous laisser debout tant qu’il ne sera pas de qualité. Ce n’est pas là volonté militariste de vous humilier, mais condition nécessaire à mon enseignement : délimitation d’un espace, la classe, où l’on doit entendre la parole d’autrui : celle des grands auteurs dont les textes que nous lisons font entendre la voix, respect de la mienne, simple passeuse de savoir, chargée de structurer votre parole, afin que vous puissiez, à votre tour, vous faire entendre et être pris au sérieux, respect de la voix de vos camarades qui s’exercent à formuler leur pensée. Mais veut-on encore vous apprendre à penser ?
Oui, je continuerai à faire la chasse aux portables et aux I-Pods en cours pour les mêmes raisons.
Oui, je sanctionnerai, autant que mes forces me le permettront – mais il ne faut préjuger de rien, l’usure gagne – vos retards systématiques, votre désinvolture, vos comportements égocentriques, insolents, agressifs et insultants, car je suis un être humain, nanti d’un système nerveux qui n’est pas à toute épreuve, mais conserve le sens de la dignité, de la mienne comme de la vôtre.
Non, je ne ferai pas de stage pour apprendre à “gérer les conflits” et mon propre stress, comme si des ficelles psycho-techniques pouvaient se substituer à la loi qui doit être appliquée, à l’ordre que l’institution doit avant tout garantir, afin de nous protéger vous et moi contre tout acte de violence verbale ou physique, condition sine qua non pour commencer à pouvoir travailler. Non, le “prof” n’est pas un outil qu’on doit rendre plus performant pour vous mater, vous manipuler ou vous séduire.
Non, je ne négocierai pas mes notes, malgré les pressions : celles de l’administration qui sait si bien faire porter la responsabilité d’une moyenne de classe trop basse au professeur, toujours trop exigeant et trop sévère ; celle de nos inspecteurs qui nous “invitent à l’indulgence” dans les commissions d’harmonisation du Brevet et du Bac et nous enjoignent de revenir sur les copies aux notes trop basses ; celles de vos parents qui, dans leur grande majorité, s’alarment à la première de vos faiblesses et me font savoir que “l’année dernière, ça marchait pourtant si bien avec M. Machin” (lequel n’hésitait pas, pour avoir la paix, à surnoter de la manière la plus démagogique qui soit) ; et celles que vous-mêmes savez si bien exercer sur les “adultes” d’aujourd’hui, plus prompts à laisser faire, à négocier des contrats, qu’à faire respecter des règles, sans faiblir – sachant qu’ils n’en tireront jamais aucune gratification immédiate – et qui semblent devenus incapables de supporter cette frustration inhérente à leur fonction d’enseignant et maintenant d’éducateur. Non, je ne me transformerai pas en animatrice de MJC , pour ne pas “vous prendre la tête”, ou parce que apprendre et travailler vous “gave”."Vous" ? Vous, chers collègues, broyés un peu plus chaque jour par une institution qui ne vous protège plus, en dépit de l’article 11 du code de la Fonction Publique qui est encore censé protéger le fonctionnaire contre les outrages ou délits exercés à son encontre dans l’exercice de ses fonctions.
Vous qui jonglez désespérément avec les impératifs de vos programmes qu’il vous faut boucler impérativement dans l’année, mais que l’on vous enjoint d’adapter à chacun de vos élèves dont les niveaux sont, d’une année sur l’autre, plus disparates au sein d’une même classe (puisque les plus perdus passent dans la classe supérieure “au bénéfice de l’âge” ou malgré l’avis des professeurs).
Vous qui vous efforcez de maintenir encore les apparences, alors que tout le système est fissuré ; vous qui direz au conseil de classe : “ Tout va très bien Madame la Marquise” ou “ Avec moi ça se passe bien”, alors que vous pouvez, sans guère vous tromper, annoncer en début d’année, qui sera reçu ou non au Brevet, car les jeux sont faits en septembre et que, pour l’essentiel, vos cours sont devenus très souvent une garderie culturelle où vous tentez de maintenir laborieusement une relative paix sociale, en limitant vos exigences, en surnotant, en renonçant un peu plus chaque jour à transmettre ce que vous avez reçu, car “l’enfant, au centre du système, doit construire lui-même son savoir”, choisir ses matières, ses options, pour un projet devenu essentiellement professionnel. Les valeurs humanistes qui vous ont structurés sont chaque jour un peu plus bafouées au sommet de l’Etat. Il s’agit maintenant d’évaluer des compétences à travers des grilles d’évaluation fabriquées par et pour l’entreprise, au niveau européen, compétences dites souvent transversales qui n’ont plus rien à voir avec l’acquisition de savoirs exigeants dans des disciplines bien précises. Le livret de compétences doit garantir “l’employabilité future” de ceux qui sortiront du système sans diplôme national reconnu et sans qualifications.
Vous, les professeurs d’Humanités (latin et grec) dont il est de bon ton de ridiculiser vos enseignements, que l’on s’est employé à reléguer très tôt ou très tard dans la journée du collégien ou du lycéen, de manière à faire chuter inexorablement les effectifs ; vous qui transmettez les fondements de notre culture et qu’on met en concurrence en 3ème avec l’option DP3, découverte de l’entreprise… Vous qui enseignez une option que nos élèves-consommateurs peuvent essayer au gré de leur fantaisie et abandonner sur une simple lettre de parents qui obtiendra l’arrêt souhaité, pour peu que les notes de latin du chérubin ne lui fassent baisser sa moyenne. Vous qui vous sentez responsables, voire coupables, du désintérêt que ces matières suscitent, vous à qui vos inspecteurs-formateurs suggèrent de rendre vos cours plus attractifs (sorties, jeux, Olympiades…) tout en vous sommant de vous conformer aux Instructions Officielles qui ne transigent pas avec les connaissances grammaticales à acquérir .Vous dont les classes ne doivent jamais s’ennuyer ! Vous qui êtes, même aux yeux de vos collègues, le prof ringard qui persiste à enseigner des savoirs désuets et inutiles et qui ne devrait pas se plaindre…vu ses effectifs réduits.
Vous qui vieillissez, vous qui vous fatiguez plus vite, vous qui êtes maintenant une loque en fin de journée, lasse du bruit et des tensions incessantes, à qui le système demande désormais de rendre compte chaque jour, sur un cahier de textes numérique, de ce que vous avez fait en classe, heure par heure ; vous que Big Brother place ainsi sous le contrôle permanent de vos supérieurs et des parents d’élèves ; vous qui pourrez dorénavant recevoir chaque soir, chez vous, des mails d’élèves, ou de leurs parents, jugeant normal de vous interpeller par écrit et attendant bien sûr de vous la réponse rapide qui leur est due. Vous qu’on flique honteusement comme on ne le fait pour aucune profession.
Vous à qui la société entière peut ainsi demander des comptes à tout moment ; vous qu’on livre à toutes les pressions aisément imaginables et qu’on place dans la situation de devoir vous justifier, de vous défendre sans cesse, car vous êtes devenu le fonctionnaire, bouc-émissaire par excellence, livré régulièrement en pâture à l’opinion publique.
Vous qui en perdez le sommeil ; vous qui ne pouvez travailler avec ce couteau sous la gorge, vous qui tentez de reconstruire chaque soir une image acceptable de vous-même au travail avant de vous en remettre au somnifère ou à l’anxiolytique qui vous permettra, enfin, de dormir, car vous ne pouvez imaginer tenir vos classes demain sans ces heures de sommeil. Vous qui travaillez en apnée entre ces périodes de vacances que tous vous envient et vous reprochent, ultimes bouées qui vous permettent de vous reconstituer avant de découvrir, à chaque rentrée, que la situation se détériore irrémédiablement et que vous êtes, vous, professeur, jeune ou vieux, en première ligne chaque jour, de moins en moins sûr de tenir, si une volonté politique ne rappelle pas, très vite à chacun (parent, élève, professeur) la place qui devrait être la sienne dans une institution laïque et républicaine, si elle ne vous rend pas de toute urgence votre dignité, votre autorité, et des conditions de travail et de salaire décentes.
Vous, parents, élèves, professeurs, qui espérez qu’on tirera une leçon du sacrifice de notre collègue…Quelle leçon ? Telle est la question !
M.C. Perrin-Faivre, professeur de Lettres à Nancy.
Et toujours rien en réponse, ou plutôt toujours pire ...
- VaniaNiveau 4
Quelle lettre, c'est poignant! Je m'y reconnais pleinement, et j'imagine que je ne suis pas la seule.
Une question : est-elle parue dans la presse?
Une question : est-elle parue dans la presse?
- Spinoza1670Esprit éclairé
Lise nous a rappelé de manière décisive qu'à un moment, il faut prendre son courage à deux mains et tout sacrifier, même sa vie, pour l'avenir de l'humanité.
Depuis ce temps, je ne sacrifie certes pas ma vie mais une partie importante de mon temps de loisir pour réfléchir à des améliorations possibles dans l'instruction et faire connaître des idées ou des outils éducatifs.
Depuis ce temps, je ne sacrifie certes pas ma vie mais une partie importante de mon temps de loisir pour réfléchir à des améliorations possibles dans l'instruction et faire connaître des idées ou des outils éducatifs.
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« Let not any one pacify his conscience by the delusion that he can do no harm if he takes no part, and forms no opinion. Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing. » (John Stuart Mill)
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