Littérature fantastique

Dans le cadre d'une séquence sur la nouvelle et plus particulièrement la nouvelle fantastique, je compte faire une synthèse sur le fantastique. Rien de bien nouveau sous le soleil me direz-vous... Je comptais définir le fantastique comme l'hésitation entre explication rationnelle et surnaturelle à un phénomène étrange et inexpliqué... mais que répondriez-vous si un élève demandait : "Mais dans les histoires comme celle de Dracula, il n'y a pas d'hésitation car pas d'explication rationnelle" ?

Tout à fait! Et la définition de Todorov (celle que tu donnes) n'est pas valable tout le temps, loin de là! Je donne deux définitions à mes élèves, celle de base (présence d'éléments surnaturels qui défient les lois de la physique) PUIS après Todorov, leur apprenant à faire le distinguo.

J'hésite à te répondre car je ne suis pas sûre de moi et je ne voudrais pas t'induire en erreur...mais je dirais que Dracula c'est vraiment du fantastique car, comme le dirait ton éventuel élève, il n'y a pas d'hésitation et pas d'explication rationnelle...alors que "l'hésitation entre explication rationnelle et explication surnaturelle" définirait plutôt l'étrange (certains textes de Maupassant ). Attends toutefois d'autres avis, que je serais curieuse de lire moi aussi

Ok. Merci beaucoup.
Pour l'instant, j'avoue humblement que je me contentais de celle de Todorov mais je la trouvais "limitée" car elle ne s'appliquait pas tout le temps.
Mais comment fais-tu alors avec ta première définition (présence d'éléments surnaturels défiant les lois de la physique) pour qu'ils ne mélangent pas avec le merveilleux ?

Oui, Nuages. Merci pour avoir répondu.
Attendons de voir aussi d'autres avis. Le sujet m'intéresse et je me pose la question depuis un moment...

là , pour ta question 22h23, je suis sûre! le registre n'est pas le même: le fantastique est lié à l'angoisse, à la peur de la mort et à l'au-dela, ses créatures surnaturelles sont effrayantes, alors que le merveilleux est lié à la féérie et les créatures surnaturelles sont bienveillantes, tout se termine bien pour les gentils!

Je croyais que ce qui définissait le merveilleux était le fait que le "surnaturel" ne surprenait personne, que c'était normal, admis par les personnages.
Car les sorcières ne sont pas bienveillantes par exemple et certains contes ne se finissent pas bien... Non ?

Dans le fantastique le cadre est réel, dans le merveilleux pas forcément, non ?

Le merveilleux n'est pas ancré dans une réalité géographique ou temporelle...on s'y trouve dans un monde à part, où tout est possible, où l'existence de sorcières ou dragons relève de la norme.

Dans le fantastique défini comme irruption d'éléments défiant la physique, la normalité est transgressée. Le monde normal continue de tourner, mais un élément inexplicable, irrationnel surgit. C'est le mot clé: la transgression. La rupture du mince voile séparant les deux mondes... et pour le coup, c'est très clair dans le Dracula de Coppola (oui, j'avoue, j'ai beaucoup bossé dessus en UV d'analyse filmique à la fac..lol).

C'est cette collision des deux mondes qui mène à la définition du fantastique comme hésitation entre explication rationnelle et surnaturelle. Enfin, je crois..lol

il me semble que dans les contes merveilleux les méchantes sorcières voient leurs maléfices contrés par les adjuvants bienveillants (dans la belle au bois dormant) . Certes le petit Chaperon rouge se finit mal mais parce que Perrault a voulu en faire un conte utile de mise en garde destiné aux jeunes filles . Mais j'arrête d'intervenir et je lis d'autres avis sur ce sujet...

(euh... pour répondre à saraswati je dirais que c'est dans l'étrange que le cadre est réel)

nuages a écrit:il me semble que dans les contes merveilleux les méchantes sorcières voient leurs maléfices contrés par les adjuvants bienveillants (dans la belle au bois dormant) . Certes le petit Chaperon rouge se finit mal mais parce que Perrault a voulu en faire un conte utile de mise en garde destiné aux jeunes filles . Mais j'arrête d'intervenir et je lis d'autres avis sur ce sujet...

(euh... pour répondre à saraswati je dirais que c'est dans l'étrange que le cadre est réel)

Il l'est dans le fantastique aussi Nuages...

pas vraiment toujours dans le fantastique , Audrey, par exemple les manoirs gothiques isolés de Poe relèvent beaucoup de l'imaginaire . Je ne sais plus exactement de mémoire la citation (un néoprof va sûrement la trouver) qui définit la frontière entre réel et fantastique et l'entrée dans l'univers fantastique: "au-delà du fleuve les fantômes vinrent à sa rencontre"????

"Dès qu'il eut franchi le pont, les fatômes vinrent à sa rencontre", un des cartons du Nosferatu de Murnau si je ne m'abuse, tiré du dracula de stoker...

Et justement, cette frontière du pont est le lieu de la transgression, au sens étymologique du terme...le cadre premier est réel. Aller au delà met le héros aux prises avec un monde aux lois physiques perverties.

Mais par ailleurs, le doute est bien présent dans de nombreux passages de Dracula....

Je ne m'étais jamais posé la question ... intéressant !
J'aime bien vos analyses.
Le vampire était pour moi une figure mythologique...

La mythe n'a-t-il pas une fonction d'explication du monde et de son fonctionnement? J'ai du mal à voir le vampire sous cet aspect-là..

Mais n'y avait-il pas une spécialiste du mythe sur le forum? Je ne me souviens plus de son identité, mince..

Todorov, c'est bien gentil mais c'est très franco-français, et si on le suit jusqu'au bout, peu de textes ont finalement fantastiques.
Pour un dépassement pertinent, voir les bouquins de Denis Mellier.
Perso, je dis que le fantastique cherche à faire peur. Puis je distingue soigneusement de l'horreur, qui inspire la répulsion.
Et enfin, je distingue deux types de fantastique : celui qui montre et celui qui suggère.

Il me semblait que c'était bien un mythe - pas d'Europe de l'est, d'ailleurs - mais mes souvenirs sur le sujet datent.
A creuser...

Une petite lecture sympa pour les accros :
http://www.maison-hantee.com/files/jmarigny/itw_jmarigny_imp.pdf

Ton lien ne marche pas Nellen..
Je suppose que c'est ça que tu voulais: Interview de Jean Marigny

Oui !
J'essaie des trucs dingues avec cet ordinateur ...
Des manips inédites, totalement folles !
Et... je crois que je vais devoir m'entraîner encore.

LOL
T'inquiète pas...ça vient vite!

Super !!! Je n'étais jamais allée si loin, et m'en étais arrêtée à Todorov, en me disant que c'était bien un peu restrictif... Mais, en vous lisant, c'est plus clair, merci pour la question et les réponses...
Merci Néoprofs !!!!

Merci pour ces réponses. Je ne suis pas très sûre de ce que je vais dire aux élèves mais je vais y cogiter cette nuit.

Vous m'avez mis un de ces bazars dans ma p'tite tête !!
Bon, va falloir que je replanche sur le fantastique...

Cette année, je leur fais étudier Le Diable Amoureux de Cazotte. Les èlèves m'ont dit que le libraire avait dit qu'il n'en avait jamais commandé pour des élèves.

Quelqu'un l'a fait?