- VivivavaNiveau 10
Bonsoir,
je compte faire une séquence en première sur l'éloge de la chevelure en poésie, et comme je vais avoir une classe qui va travailler en anglais sur les représentations de la chevelure frisée (via Americanah notamment), je souhaiterais ajouter à ma séquence un poème qui valorise ce type de chevelure pour faire un peu contrepoint aux critiques de la chevelure frisée chez Du Bellay par exemple.
Mes recherches chez des poètes de la négritude sont pour l'instant infructueuses et je connais peu la poésie francophone.
Auriez-vous des poèmes à me conseiller ?
Merci d'avance.
je compte faire une séquence en première sur l'éloge de la chevelure en poésie, et comme je vais avoir une classe qui va travailler en anglais sur les représentations de la chevelure frisée (via Americanah notamment), je souhaiterais ajouter à ma séquence un poème qui valorise ce type de chevelure pour faire un peu contrepoint aux critiques de la chevelure frisée chez Du Bellay par exemple.
Mes recherches chez des poètes de la négritude sont pour l'instant infructueuses et je connais peu la poésie francophone.
Auriez-vous des poèmes à me conseiller ?
Merci d'avance.
- dorémyExpert spécialisé
"La chevelure" de Baudelaire :
Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormants dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !
La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! Nage sur ton parfum.
J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :
Un port retentissant où mon âme peut boire
À grands flots le parfum, le son et la couleur ;
Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire,
Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire
D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.
Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse !
Infinis bercements du loisir embaumé !
Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,
Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ;
Sur les bords duvetés de vos mèches tordues
Je m'enivre ardemment des senteurs confondues
De l'huile de coco, du musc et du goudron.
Longtemps ! Toujours ! Ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?
Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormants dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !
La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! Nage sur ton parfum.
J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :
Un port retentissant où mon âme peut boire
À grands flots le parfum, le son et la couleur ;
Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire,
Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire
D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.
Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse !
Infinis bercements du loisir embaumé !
Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,
Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ;
Sur les bords duvetés de vos mèches tordues
Je m'enivre ardemment des senteurs confondues
De l'huile de coco, du musc et du goudron.
Longtemps ! Toujours ! Ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?
- Mrs D.Niveau 5
Je ne sais pas si j'enfonce une porte ouverte car la référence me semble très classique, même pour un GT sur le chevelure en général (frisée ou non), mais comme tu n'en parles pas : Baudelaire, "La Chevelure" ? Ou bien j'ai mal compris et tu cherches un poème forcément lié à la négritude ?
_________________
"Always the years between us. Always the years. Always the love. Always the hours." Stephen Daldry, The Hours
https://toujourslesheures.wordpress.com/
- VivivavaNiveau 10
Pardon, j'ai oublié de dire que je voulais un autre poème que "La Chevelure" de Baudelaire. Mais merci !
- Madame MadoNiveau 8
[...]
"Sais-je où s’en iront tes cheveux
Crépus comme mer qui moutonne
Sais-je où s’en iront tes cheveux
Et tes mains feuilles de l’automne
Que jonchent aussi nos aveux"
[...]
Apollinaire
"Sais-je où s’en iront tes cheveux
Crépus comme mer qui moutonne
Sais-je où s’en iront tes cheveux
Et tes mains feuilles de l’automne
Que jonchent aussi nos aveux"
[...]
Apollinaire
_________________
mon blog artistique
- VivivavaNiveau 10
Merci pour la référence à Apollinaire.
J'aurais dû préciser davantage ma demande : j'ai collecté des blasons de la chevelure, des poèmes dont le sujet principal est la chevelure (j'avais donc mis de côté "Marie" d'Apollinaire, ou "Femme noire" de Senghor) et effectivement, je souhaiterais élargir mon corpus à des poètes de la francophonie (négritude par exemple), voire à des poètes étrangers (en lecture cursive).
Merci Thalia de G d'avoir mis le topic dans la section adéquate ; les conseils des collègues de collège sont les bienvenus.
J'aurais dû préciser davantage ma demande : j'ai collecté des blasons de la chevelure, des poèmes dont le sujet principal est la chevelure (j'avais donc mis de côté "Marie" d'Apollinaire, ou "Femme noire" de Senghor) et effectivement, je souhaiterais élargir mon corpus à des poètes de la francophonie (négritude par exemple), voire à des poètes étrangers (en lecture cursive).
Merci Thalia de G d'avoir mis le topic dans la section adéquate ; les conseils des collègues de collège sont les bienvenus.
- VivivavaNiveau 10
J'ai trouvé celui-ci, mais il est difficile :
Dirait-on pas bombardé d’un sang de latérites
bel arbre nu
en déjà l’invincible départ vers on imagine un sabbat de splendeur
et de villes l’invincible et spacieux cri du coq
Innocence qui ondoies
tous les sucs qui montent dans la luxure de la terre
tous les poisons que distillent les alambics nocturnes
dans l’involucré des malvacées
tous les tonnerres des saponaires
sont pareils à ces mots discordants écrits par l’incendie des bûchers
sur les oriflammes sublimes de ta révolte
Chevelure
flammes ingénues qui léchez un coeur insolite
la forêt se souviendra de l’eau et de l’aubier
comme moi je me souviens du museau attendri
des grands fleuves qui titubent comme des aveugles
la forêt se souvient que le dernier mot ne peut être
que le cri flambant de l’oiseau des ruines dans le bol de l’orage
Innocent qui va là
oublie de te rappeler
que le baobab est notre arbre
qu’il mal agite des bras si nains
qu’on le dirait un géant imbécile
et toi
séjour de mon insolence de mes tombes de mes trombes
crinière paquet de lianes espoir fort des naufragés
dors doucement au tronc méticuleux de mon étreinte ma femme
ma citadelle
Aimé Césaire, Cadastre
Dirait-on pas bombardé d’un sang de latérites
bel arbre nu
en déjà l’invincible départ vers on imagine un sabbat de splendeur
et de villes l’invincible et spacieux cri du coq
Innocence qui ondoies
tous les sucs qui montent dans la luxure de la terre
tous les poisons que distillent les alambics nocturnes
dans l’involucré des malvacées
tous les tonnerres des saponaires
sont pareils à ces mots discordants écrits par l’incendie des bûchers
sur les oriflammes sublimes de ta révolte
Chevelure
flammes ingénues qui léchez un coeur insolite
la forêt se souviendra de l’eau et de l’aubier
comme moi je me souviens du museau attendri
des grands fleuves qui titubent comme des aveugles
la forêt se souvient que le dernier mot ne peut être
que le cri flambant de l’oiseau des ruines dans le bol de l’orage
Innocent qui va là
oublie de te rappeler
que le baobab est notre arbre
qu’il mal agite des bras si nains
qu’on le dirait un géant imbécile
et toi
séjour de mon insolence de mes tombes de mes trombes
crinière paquet de lianes espoir fort des naufragés
dors doucement au tronc méticuleux de mon étreinte ma femme
ma citadelle
Aimé Césaire, Cadastre
- CorydonNiveau 4
Pour les poètes étrangers, il y a le sonnet de Pétrarque Erano i capei d'oro a l'aura sparsi, dont j'ai trouvé la traduction en français :
DES CHEVEUX D’OR
Il était une fois des cheveux d’or épars
Des cheveux d’or qui s’envolaient en mille doux nœuds,
Et la belle lumière vague brûlait ardente,
Les beaux yeux ne sont pas aussi avares qu’ils paraissent.
Et je vis de la pitoyable couleur des farces,
Le visage coloré de pitié.
Moi qui gardais en mon cœur, l’attrait de l’amour
Quelle merveille est si vite brûlée ?
Les pas ne sont pas chose mortelle
Mais angéliques formes ; et les paroles
Sonnent autrement que voix humaine.
Un esprit du ciel, un vivant soleil,
Exista comme je vis ; et sans limites,
La plaie ne guérit pas, une fois l’arc détendu.
PÉTRARQUE
Traduction poétique de Catherine RÉAULT-CROSNIER
Si cela peut intéresser, il existe aussi un texte d'Anna de Noailles intitulé Fantaisie et jeunesse des femmes sur l'intérêt pour les femmes d'avoir des cheveux longs.
DES CHEVEUX D’OR
Il était une fois des cheveux d’or épars
Des cheveux d’or qui s’envolaient en mille doux nœuds,
Et la belle lumière vague brûlait ardente,
Les beaux yeux ne sont pas aussi avares qu’ils paraissent.
Et je vis de la pitoyable couleur des farces,
Le visage coloré de pitié.
Moi qui gardais en mon cœur, l’attrait de l’amour
Quelle merveille est si vite brûlée ?
Les pas ne sont pas chose mortelle
Mais angéliques formes ; et les paroles
Sonnent autrement que voix humaine.
Un esprit du ciel, un vivant soleil,
Exista comme je vis ; et sans limites,
La plaie ne guérit pas, une fois l’arc détendu.
PÉTRARQUE
Traduction poétique de Catherine RÉAULT-CROSNIER
Si cela peut intéresser, il existe aussi un texte d'Anna de Noailles intitulé Fantaisie et jeunesse des femmes sur l'intérêt pour les femmes d'avoir des cheveux longs.
- OxfordNeoprof expérimenté
Le Démêloir
Théodore de Banville
Quelle est celle-ci qui s’avance comme
l’Aurore lorsqu’elle se lève, qui est belle
comme la Lune et éclatante comme le Soleil,
et qui est terrible comme une armée rangée en
bataille ?
Cantique des cantiques.
Je sais qu’elle est pareille aux Anges de lumière.
Elle a des rayons d’astre éclos sous sa paupière,
Et je vois aux candeurs de son pied calme et pur
Qu’il a marché longtemps sur les tapis d’azur.
Sa bouche harmonieuse et de charme inondée
Semble, à son doux parfum de roses de Judée,
Avoir vidé la coupe aux noces de Cana,
Et chanté dans les cieux le Salve Regina.
Mais ces tempes de marbre et ce sourcil farouche,
La superbe fierté du front et de la bouche,
Ces rougeurs, ce duvet pleins de défis mordants,
L’insolente fraîcheur de ces tons discordants,
Ces ongles lumineux et ces dents de tigresse
A des instants furtifs trahissent la Déesse.
Quand, pareille aux Vénus que je chante en mes vers,
Sous un grand démêloir d’écaille aux reflets verts
Elle fait ruisseler, en sortant de l’alcôve,
Cette ample chevelure à l’or sanglant et fauve,
Quand ses mains de statue achèvent d’y verser
Le flot d’huile épandu, le soleil fait glisser
Sur ces âpres trésors, qu’à loisir elle baigne,
Un rayon rose au bout de chaque dent du peigne.
Février 1844.
Théodore de Banville, Les Stalactites, 1846
Théodore de Banville
Quelle est celle-ci qui s’avance comme
l’Aurore lorsqu’elle se lève, qui est belle
comme la Lune et éclatante comme le Soleil,
et qui est terrible comme une armée rangée en
bataille ?
Cantique des cantiques.
Je sais qu’elle est pareille aux Anges de lumière.
Elle a des rayons d’astre éclos sous sa paupière,
Et je vois aux candeurs de son pied calme et pur
Qu’il a marché longtemps sur les tapis d’azur.
Sa bouche harmonieuse et de charme inondée
Semble, à son doux parfum de roses de Judée,
Avoir vidé la coupe aux noces de Cana,
Et chanté dans les cieux le Salve Regina.
Mais ces tempes de marbre et ce sourcil farouche,
La superbe fierté du front et de la bouche,
Ces rougeurs, ce duvet pleins de défis mordants,
L’insolente fraîcheur de ces tons discordants,
Ces ongles lumineux et ces dents de tigresse
A des instants furtifs trahissent la Déesse.
Quand, pareille aux Vénus que je chante en mes vers,
Sous un grand démêloir d’écaille aux reflets verts
Elle fait ruisseler, en sortant de l’alcôve,
Cette ample chevelure à l’or sanglant et fauve,
Quand ses mains de statue achèvent d’y verser
Le flot d’huile épandu, le soleil fait glisser
Sur ces âpres trésors, qu’à loisir elle baigne,
Un rayon rose au bout de chaque dent du peigne.
Février 1844.
Théodore de Banville, Les Stalactites, 1846
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Tutti i ghjorna si n'impara.
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