- henrietteMédiateur
Je retravaille Voyage en terre de Brésil, tout en lisant en parallèle Rouge Brésil, et quelque chose m'intrigue. Quel est le phénomène des "pluies infectes" dont parle Jean de Léry, et que reprend tel quel ou presque Rufin ?
"La pluie qui tombe sous et aux abords de cette ligne équinoxiale, non seulement pue et sent très mauvais, mais elle est aussi contagieuse au point que si elle tombe sur la peau, elle engendre des pustules et de grosses cloques, et même tache et gâte les vêtements."
Jean de Léry ajoute que ceux qui la boivent tombent malades.
Rufin reprend tout cela et rajoute même qu'elle ronge le métal des épées.
De quoi s'agit-il donc ??
"La pluie qui tombe sous et aux abords de cette ligne équinoxiale, non seulement pue et sent très mauvais, mais elle est aussi contagieuse au point que si elle tombe sur la peau, elle engendre des pustules et de grosses cloques, et même tache et gâte les vêtements."
Jean de Léry ajoute que ceux qui la boivent tombent malades.
Rufin reprend tout cela et rajoute même qu'elle ronge le métal des épées.
De quoi s'agit-il donc ??
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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- DeliaEsprit éclairé
Jean de Léry a sans doute cherché à s'abriter de la pluie sous un mancenillier.
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Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.
Amadou Hampaté Ba
- TivinouDoyen
Tu travailles avec quelle édition? J'ai celle du Livre de Poche (Lestringant je crois). Il y a peut-être une note si tu veux que je cherche. C'est dans quel chapitre?
Edit. J'ai trouvé des notes dans mon édition, mais qui ne sont guère éclairantes, si ce n'est que ces pluies sont attestées aussi chez Thevet et Paulmier de Gonneville. Ce sont des pluies en mer au niveau du Pot-au-noir, si j'ai bien compris. Réalité ou fiction, je ne sais pas.
Edit. J'ai trouvé des notes dans mon édition, mais qui ne sont guère éclairantes, si ce n'est que ces pluies sont attestées aussi chez Thevet et Paulmier de Gonneville. Ce sont des pluies en mer au niveau du Pot-au-noir, si j'ai bien compris. Réalité ou fiction, je ne sais pas.
- henrietteMédiateur
Merci beaucoup, Tivinou, je veux bien : c'est dans le chapitre 4.
@Delia : l'épisode relaté est au cours de la traversée, au milieu de l'Océan Atlantique.
@Delia : l'épisode relaté est au cours de la traversée, au milieu de l'Océan Atlantique.
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- TivinouDoyen
Nos messages se sont croisés.
- InvitéInvité
Ça fait un peu pluie acide comme description chez Léry. Ça ne pourrait pas être une pluie contaminée par du dioxyde de soufre d'origine volcanique (venu des Antilles avec les vents d'ouest). A l'aide les collègues de SVT et de physique !
Autre hypothèse : le marin de vigie en haut du mat qui dégobille un mélange de rhum et de sucs gastriques. Au moins ça fera rire les élèves
Autre hypothèse : le marin de vigie en haut du mat qui dégobille un mélange de rhum et de sucs gastriques. Au moins ça fera rire les élèves
- TivinouDoyen
Je me demande dans quelle mesure ce n'est pas inventé. C'est le moment du passage de l'Equateur et du monde de par-deçà au monde de par-delà, une sorte de lieu étrange, qui a cristallisé les peurs des marins, qui l'appelaient la "zone incertaine" avant qu'elle ne devienne le Pot-au-Noir.
Mais si quelqu'un a une vraie réponse, ça m'intéresse.
Mais si quelqu'un a une vraie réponse, ça m'intéresse.
- Spoiler:
- C'est sûr que le marin qui dégobille, ça pue et ça tache les habits. Cela coïncide bien avec la description faite par Paulmier de Gonneville: "et aussi étaient incommodés de pluies puantes qui tachaient les habits".
- henrietteMédiateur
Merci pour ta contribution poétique, Tam ! :lol:
Ce qui m'étonne, c'est que contrairement à Thevet qui n'était pas étouffé par le souci de l'exactitude et de la véracité, on dira, Jean de Léry met son point d'honneur, justement, à ne rapporter que ce dont il a été personnellement témoin, et entend corriger les inepties et les inventions racontées par Thevet. Pourquoi alors lui emboîter le pas pour inventer ça, qui décridibiliserait tout le reste de son récit ?
Ce qui m'étonne, c'est que contrairement à Thevet qui n'était pas étouffé par le souci de l'exactitude et de la véracité, on dira, Jean de Léry met son point d'honneur, justement, à ne rapporter que ce dont il a été personnellement témoin, et entend corriger les inepties et les inventions racontées par Thevet. Pourquoi alors lui emboîter le pas pour inventer ça, qui décridibiliserait tout le reste de son récit ?
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- InvitéInvité
Moi si le gars dit vrai je reste sur l'hypothèse du soufre : dioxyde volcanique ou anhydride sulfureux (décomposition d'algues?). Ça pique et ça pue.
- henrietteMédiateur
Ah oui, le coup de l'anhydride sulfureux, pourquoi pas. Il pourrait s'agir alors d'un phénomène de la Mer des Sargasses ? Ce serait cohérent avec les alternances de tourbillons et de pot-au-noir. Mais ni Léry ni Thevet ne décrivent des algues.
Je ne crois pas trop par contre à l'hypothèse volcanique car ce phénomène est décrit par Léry à l'aller comme au retour, et Thevet avait voyagé un ou deux ans avant lui, sans parler de Paulmier de Gonneville qui fit le voyage une cinquantaine d'années plus tôt.
Je ne crois pas trop par contre à l'hypothèse volcanique car ce phénomène est décrit par Léry à l'aller comme au retour, et Thevet avait voyagé un ou deux ans avant lui, sans parler de Paulmier de Gonneville qui fit le voyage une cinquantaine d'années plus tôt.
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- InvitéInvité
henriette a écrit:Ah oui, le coup de l'anhydride sulfureux, pourquoi pas. Il pourrait s'agir alors d'un phénomène de la Mer des Sargasses ? Ce serait cohérent avec les alternances de tourbillons et de pot-au-noir. Mais ni Léry ni Thevet ne décrivent des algues.
Je ne crois pas trop par contre à l'hypothèse volcanique car ce phénomène est décrit par Léry à l'aller comme au retour, et Thevet avait voyagé un ou deux ans avant lui, sans parler de Paulmier de Gonneville qui fit le voyage une cinquantaine d'années plus tôt.
C'est ce à quoi je pensais. Évaporation mélangée aux gaz des algues en décomposition, un coup de vent et zou maï... Mais je délire sans doute complètement. Je n'ai pas de carte du voyage de Léry.
- henrietteMédiateur
On le voit sur cette carte, mais pas sûre que ce soit très précis. Mais la Mer des Sargasses est nettement plus à l'Ouest que son itinéraire.
Bref le mystère demeure...
Bref le mystère demeure...
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- InvitéInvité
Oui c'est même bien loin...
- TivinouDoyen
Dans mon édition, Lestringant conseille le chapitre VIII de Tristes tropiques. Impossible de mettre la main sur ce fichu bouquin. J'ai dû le prêter.
- henrietteMédiateur
Bon, la mienne est à Strasbourg, ça va être pratique !
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- henrietteMédiateur
Bon j'ai édité le titre en espérant attirer ici des collègues scientifiques.
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- BaldredSage
Tivinou a écrit:Dans mon édition, Lestringant conseille le chapitre VIII de Tristes tropiques. Impossible de mettre la main sur ce fichu bouquin. J'ai dû le prêter.
Bonsoir,
Le chap VIII a en effet pour titre Le Pot-au-Noir. Lévi-Strauss associe la zone géographique à un passage symbolique entre Ancien et Nouveau Monde. Pour le plaisir :
pp78-79 : " De l'autre côté de la fosse, seraient-ils encore là pour nous accueillir, tous ces prodiges perçus par les navigateurs des anciens siècles ? En parcourant les espaces vierges, ils étaient moins occupés de découvrir un nouveau monde que de vérifier le passé de l'ancien. Adam, Ulysse leur étaient confirmés [...] Le ciel fuligineux du Pot-au-Noir, son atmosphère pesante ne sont pas seulement le signe manifeste de la ligne équatoriale. Ils résument le climat sous lequel deux mondes se sont affrontés. Ce morne élément qui les sépare, cette bonace où les forces malfaisantes semblent seulement se réparer, sont la dernière barrière mystique entre ce qui constituait, hier encore, deux planètes opposées par des conditions si différentes que les premiers témoins ne purent croire qu'elles fussent également humaines."
Lévy-Strauss évoque ensuite les "prodiges" décrits par les voyageurs, à commencer par Christophe Colomb. Cette barrière mystique mérite bien les pluies de Lery pour en marquer le passage. Une image initiatique peut-être ?
- henrietteMédiateur
Merci beaucoup, Baldred. Donc une sorte de phénomène d'auto suggestion ?
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- BaldredSage
henriette a écrit:Merci beaucoup, Baldred. Donc une sorte de phénomène d'auto suggestion ?
Lévy-Strauss cite d'autres "exagérations" en particulier de Colomb, qui voit 3 sirènes.
Il est passionnant de voir ce dont les hommes ont pu se convaincre, plus difficile de comprendre comment.
Auto suggestion peut-être, maladie ( voir les symptômes de l'ergotisme/ mal des ardents ou du scorbut) aussi, hallucinations... Mais il est intéressant que Jean de Lery situe ces pluies à l'approche de la ligne ( parle-t-il de l'équateur ?) qui s'accompagne traditionnellement de rites particuliers.
A cette époque le monde est encore "enchanté", puisque les signes existent, il est sans doute normal de les voir.
Et peut on imaginer un passage qui ne soit marqué par "rien" ?
- henrietteMédiateur
Encore une fois, mille mercis, Baldred !
Ce qui est étonnant, c'est son souci d'exactitude par ailleurs, même lorsqu'il ne comprend pas (dans le même chapitre ses observations sur la dessalaison du lard dans l'eau de mer), et le récit sans aucune tentative d'explication, sur le ton du constat, sans intervention du merveilleux. On est loin du récit (en partie de 2nde main d'ailleurs) de Colomb.
Ce qui est étonnant, c'est son souci d'exactitude par ailleurs, même lorsqu'il ne comprend pas (dans le même chapitre ses observations sur la dessalaison du lard dans l'eau de mer), et le récit sans aucune tentative d'explication, sur le ton du constat, sans intervention du merveilleux. On est loin du récit (en partie de 2nde main d'ailleurs) de Colomb.
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- TailleventFidèle du forum
En même temps, dans une zone où il y a des lamantins... Ils ont juste dû se convaincre qu'elles étaient séduisantes mais après quelques mois de mer, je ne sais pas si un marin est très regardant.Baldred a écrit:Lévy-Strauss cite d'autres "exagérations" en particulier de Colomb, qui voit 3 sirènes.
Il est passionnant de voir ce dont les hommes ont pu se convaincre, plus difficile de comprendre comment.
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