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jésus
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La philosophie et les fantômes  Empty La philosophie et les fantômes

par jésus Jeu 15 Déc 2016 - 17:32
Bonjour à tous,

Petite lubie du moment : les fantômes et autres manifestations de l'au-delà.
La mode est au paranormal sur Internet visiblement, avec des chasseurs de fantômes qui multiplient les enquêtes prétendument scientifiques .
Je cherchais des sources, le fameux de Pline l'ancien qui a associé dans l'inconscient collectif le bruit des chaînes aux fantômes.
L'essai sur les fantômes de Schopenhauer.
J'ai beaucoup travaillé sur la question via la philosophie romantique, allemande notamment ou le courant irrationaliste voire mystique dans la lignée de Paracelse.
Schelling, Hamann, Böehme , Von Schubert, Carus, le livre de Gusdorf, Novalis, Schiller, Goethe...Swendenborg. Von Baader...Jean-Paul...Wackenroder, les frères Schlegel.
( Bon, mes mémoires de fac étaient ultra perchés et mystiques, mais pointus).

Là j'ai sous la main des références de Novalis : Il disait «  Là où ne règnent plus les Dieux, règnent les spectres. »

Chateaubriand :  dans Le génie du christianisme en 1802, nous dépeint une métaphore du pèlerinage de la vie : « L’homme est suspendu dans le présent, entre le passé et l’avenir, comme un rocher entre deux gouffres, derrière lui, devant lui tout est ténèbres ; à peine perçoit-il quelques fantômes qui, remontant du fond des deux abîmes surnagent un instant à la surface puis y redescendent. »

Nerval?

Mais, j'ai pas traité exactement des fantômes...si vous avez des références sous la main, avec plaisir.

Merci!!!
Zagara
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par Zagara Jeu 15 Déc 2016 - 17:38
A mon sens il faut aller en amont de tout ça, dans les sources du Moyen Âge, où les théories sur les fantômes et les revenants ont pas mal alimenté à la fois la pastorale (comment faire son travail d'exorciste correctement ? Les laïcs ont-ils le droit de discuter avec un fantôme ? etc) et la théologie (définition, qualification des fantômes, purgatoires individuels terrestres, etc).

Les auteurs dont tu parles, parce qu'ils sont de culture européenne, s'ancrent dans ce substrat culturel médiéval chrétien pour parler de fantômes. Lequel est par exemple très différent du concept de spectre chez les Japonais, ou ailleurs. Et je crois bien que le Moyen Âge a eu beaucoup plus d'influence sur ces représentations que l'Antiquité ; c'est lui le grand producteur d'écrits sur le paranormal et son héritage est partagé par toute la population européenne. Donc il faut avoir une approche anthropologique en allant regarder les sources des sources...


Dernière édition par Zagara le Jeu 15 Déc 2016 - 17:51, édité 2 fois
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jésus
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par jésus Jeu 15 Déc 2016 - 17:40
Merci ! Si tu as des auteurs précis là-dessus...
Zagara
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par Zagara Jeu 15 Déc 2016 - 17:49
Tu as des choses dans les livres de Le Goff sur la naissance du Purgatoire (les fantômes sont intimement liés à l'incapacité à faire son salut ou sa damnation immédiatement).

Mon texte préféré sur le sujet : le dialogue avec un fantôme de Jean Gobi (XIVe siècle). C'est un exemplum de la rencontre d'un prêtre et d'un fantôme et comment il l'exorcise. Dans l'édition critique de M.-A. Polo de Beaulieu, elle y ajoute d'autres textes médiévaux sur les fantômes et une bonne introduction.
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jésus
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La philosophie et les fantômes  Empty Re: La philosophie et les fantômes

par jésus Jeu 15 Déc 2016 - 17:51
Oui, le Goff, bien sûr. Je vais voir si le livre de Gobi est trouvable ou pas.
Ruthven
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par Ruthven Jeu 15 Déc 2016 - 20:10
Tu peux aller voir les références dans le livre de Schmitt, Les revenants. Les vivants et les morts dans la philosophie médiévale. Voir aussi pour une perspective plus générale, Stéphane Rongier Théorie des fantômes (pas toujours d'une clarté folle mais peut servir à défricher le domaine).
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jésus
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La philosophie et les fantômes  Empty Re: La philosophie et les fantômes

par jésus Ven 16 Déc 2016 - 7:51
Merci, le livre de Rongier a l'air récent et exhaustif! Sympa de savoir que ce thème a une actualité et intéresse du monde, en le sortant de la sphère du paranormal!
Ruthven
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par Ruthven Ven 16 Déc 2016 - 9:01
Pour la littérature du XIXe, la somme est sans doute le livre de Daniel Sangsue, Fantômes, esprits et autres morts-vivants; dans son chap. X, il évoque même "les philosophes et les fantômes", Spinoza vs Boxel, Kant vs Swedenborg, Schopenhauer, Bergson (un texte sur les fantômes de vivant dans l'Energie spirituelle) et Derrida (Spectres de Marx).

Il me semble qu'Olivier Schefer a aussi travaillé la question (mais je ne sais plus si c'est dans Des revenants ou dans Variations nocturnes (je te le dis dès que je les retrouve)).
Laotzi
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par Laotzi Ven 16 Déc 2016 - 9:08
Ce thème me fait immédiatement penser à Spinoza et plus précisément à sa correspondance avec Hugo Boxel (disponible chez GF Flammarion).
Un extrait : (mais il faut lire les lettres qui précèdent et qui suivent, surtout les réponses de Spinoza qui sont un délice de profondeur et d'ironie)

à Monsieur Hugo Boxel,
B. de Spinoza.

Monsieur,

Votre lettre reçue hier m’a été très agréable : je désirais avoir quelques nouvelles de vous et je vois que vous ne m’avez pas tout à fait oublié. D’autres peut-être jugeraient d’un fâcheux augure [1] que vous m’écriviez au sujet des esprits. A mes yeux au contraire il y a là quelque chose qui mérite considération : non seulement les choses vraies mais aussi les sornettes et les imaginations peuvent m’être utiles.

Laissons toutefois de côté pour le moment la question de savoir si les spectres sont des fantômes de l’imagination, puisqu’il vous semble étrange d’en nier l’existence ou seulement de la mettre en doute, alors que tant d’histoires anciennes et modernes en parlent. La grande estime que j’ai toujours eue et continue d’avoir pour vous, le respect que je vous dois, ne permettent pas que je vous contredise, encore bien moins que je vous flatte. J’userai d’un moyen terme et vous demanderai de vouloir bien, parmi toutes les histoires de spectres que vous avez lues, en choisir quelqu’une, celle qui laisse le moins de place au doute et montre le plus clairement que les spectres existent. Je dois vous avouer que je n’ai jamais vu un auteur digne de foi qui en montrât clairement l’existence. Et jusqu’à cette heure j’ignore ce qu’ils sont et personne n’a jamais pu me renseigner à ce sujet. Il est cependant certain que nous devons savoir ce qu’est une chose que l’expérience nous montre si clairement. S’il n’en n’est pas ainsi, il semble bien difficile que l’existence des spectres ressorte d’aucune histoire. Ce qui en ressort c’est l’existence d’une chose dont personne ne sait ce qu’elle est. Si les philosophes veulent appeler spectres ce que nous ignorons, je n’en nierai pas l’existence, car il y a une infinité de choses que j’ignore.

Je vous prierai donc, Monsieur, avant de m’expliquer plus amplement sur ce sujet, de me dire ce que sont ces spectres ou ces esprits. Sont-ils des enfants, des simples ou des insensés ? Tout ce que l’on m’a rapporté d’eux convient plutôt à des êtres privés de raison qu’à des sages, et ce sont des puérilités, dirai-je en y mettant de l’indulgence, ou cela rappelle les jeux auxquels se plaisent les simples. Avant de finir je vous ferai cette seule observation : le désir qu’ont les hommes de raconter les choses non comme elles sont, mais comme ils voudraient qu’elles fussent, est particulièrement reconnaissable dans les récits sur les fantômes et les spectres ; la raison primitive en est, je crois, qu’en l’absence de témoins autres que les narrateurs eux-mêmes, on peut inventer à son gré, ajouter ou supprimer des circonstances selon son bon plaisir, sans avoir à craindre de contradicteur. Tout spécialement on en forge qui puissent justifier la crainte que l’on a des songes et des visions ou encore faire valoir le courage du narrateur et le grandir dans l’opinion. D’autres raisons encore me font douter, sinon des histoires elles-mêmes, au moins des circonstances relatées, et ce sont elles qu’il faut considérer pour tâcher de conclure quelque chose de ces histoires. Je m’en tiendrai là jusqu’à ce que je sache quelles sont les histoires qui ont déterminé en vous une conviction telle que le doute vous semble absurde.


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"Trouvez donc bon qu'au lieu de vous dire aussi, adieu comme autrefois, je vous dise, adieu comme à présent."
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