ohé les médias !

Je me suis levée en entendant la fin d'une chronique sur Europe 1 qui était consacrée à un commentaire de l'intervention de Juppé, hier, concernant ses projets éducatifs: c'était présenté comme "la parole des experts "de la radio dans le domaine.
Si nos résultats Pisa sont mauvais je peux donc vous révéler que, si on exclut le fait qu'à Shangaî ou en Corée, par exemple, les gamins travaillent beaucoup, beaucoup, plus, (mais bon ce sont des Chinois en somme), en fait en France ce sont les profs qui "sont mal formés et ne travaaillent pas assez" comme "les agrégés qui font 15 heures" oui, ma brave dame.
Pourquoi les médias ont-ils une telle haine des enseignants qu'ils ont les yeux obstrués à ce point sur le désastre de notre système éducatif (qui était si bon pourtant il y a quelques décennies)?
Comment le "système" fait-il pour détourner l'attention de ses incuries (voir les agressions cette semaine, pour ne parler que de cela, voir, bien pire, le fil consacré à Lise Bonnafous et les lettres d'enseignants) et rejeter commodément la faute sur les enseignants, "pas assez investis" alors que je connais peu de métier dans mon entourage où on se lève, on mange, on se couche en pensant à ce point au travail: lectures à faire, méthodes à essayer, copies à corriger, cours à préparer.
On voit se profiler les prochaines réformes, quelle que soit la majorité aux élections:
1- on avance le pion des remplacements non faits (c'est porteur pour les parents, crédules, qui ne voient pas que le prof d'EPS ne remplacera jamais en réalité le cours de maths, et que les profs de maths ne seront pas remplacés parce qu'on ne trouve plus de matheux suffisamment formé pour être prof qui veuille être prof), pour arriver à changer encore un peu plus en pire le métier d'enseignant !
car 2- la prochaine étape, ce sont les temps de travail, pas du tout protégés par les nouveaux décrets à mon humble avis, (il n'y a qu'à écouter la petite musique des médias) , quoi qu'on en ait dit, puisqu'il suffit, déjà, de pondre encore un autre décret.
Et voilà les profs transformés en vague gardiens, présents du matin au soir sur les lieux et occupant les élèves à construire des maquettes en carton (mathématique) à les peindre (arts plastiques) et à dire que c'est un théâtre romain (culture générale, langues anciennes, histoire et architecture). Pour la chimie, on leur fera lire la composition du tube de gouache. En anglais. Pendant ce temps les parents," libérés", pourront aller pointer de l'aube jusqu'au soir pour le bénéfice de l'entreprise sans laquelle rien n'est possible, on vous le dit, et sans avoir le "poids" de l'éducation de leurs mômes: l'état s'en occupe, travaillez bien braves gens, et surtout ne pensez pas, on pense pour vous.
Ras-le bol: les experts médiatiques, renseignez-vous un peu donc auprès de ceux qui connaissent le système, pas ceux qui vous le vendent!    
Ce qui est au fond presque comique, en tout cas burlesque, c'est de voir combien la pensée libérale  régnante s'acharne à détruire dans le métier d'enseignant tout ce qu'il avait effectivement de "libéral" au bon sens du terme: autonomie dans le rapport à l'élève, penser par soi-même, être libre de sa pédagogie et de ses choix, pour le remplacer par ce que les systèmes collectivistes avaient de pire (caporalisation tout azimut, prolétarisation, stakhanovisme) et dont on sait que ça ne mène qu'à faire traîner les pieds jusqu'à ce que le système, noyé sous les apparatchiks et son KGB omniprésent, s'auto-détruise....

Pour l'avoir été pendant vingt ans, je peux affirmer que 99% des journalistes vivent sur des acquis éculés et que leur système de fonctionnement ne leur permet objectivement plus (pour 99% d'entre eux) d'aller se remettre dans le réalisme du terrain. Un réalisme que les porte-paroles officiels des corporations (et généralement seules sources des journalistes ) travestissent facilement sans que les patrons des médias, pour des raisons économiques, laissent le temps nécessaire au recoupement de leurs informations. C'est la grande manip' de façon permanente.
C'est pour cela que j'ai quitté cette profession voilà six ans.

Pour entrer à l'EN: tu as un fond maso, non? :lol:

Petitfils a écrit:Pour l'avoir été pendant vingt ans, je peux affirmer que 99% des journalistes vivent sur des acquis éculés et que leur système de fonctionnement ne leur permet objectivement plus (pour 99% d'entre eux) d'aller se remettre dans le réalisme du terrain. Un réalisme que les porte-paroles officiels des corporations (et généralement seules sources des journalistes ) travestissent facilement sans que les patrons des médias, pour des raisons économiques, laissent le temps nécessaire au recoupement de leurs informations. C'est la grande manip' de façon permanente.
C'est pour cela que j'ai quitté cette profession voilà six ans.

En tout cas, merci pour ton témoignage, c'est intéressant... Et je suis d'accord avec Iphigénie: mais que diable es-tu venu faire dans cette galère ?!!

" La presse libre n'existe pas. Vous, chers amis, le savez bien, moi je le sais aussi. Aucun de vous n'oserait donner son avis personnel ouvertement. Nous sommes les pantins qui sautent et qui dansent quand ils tirent sur les fils. Notre savoir faire, nos capacités et notre vie même leur appartiennent. Nous sommes les outils et les laquais des puissances financières derrière nous. Nous ne sommes rien d'autre que des intellectuels prostitués ".

John Swaiton, l'éditeur du New York Times, lors de son discours d'adieu.

Voilà un homme sur le départ qui trouva la force de dire,il y a bien longtemps,ce que sont beaucoup de journalistes.
Pour cette raison,j'ai abandonné la télévision et finalement je ne m'en porte pas plus mal.
Plus personne pour me prescrire des émotions,me délivrer du prêt à penser,davantage de temps utilement employé etc.

Merci Iphigénie. Je voulais aussi parler de cette chronique mais j'avais un peu la flemme C'est fou comme chez les journalistes et les politiques, les chroniques sur l'éducation commencent plutôt pas mal (le constat) et finissent dans le délire quand il s'agit d'aborder les solutions.
Ainsi Juppé hier: "il faut abroger la réforme du collège. C'est une mauvaise réforme" "mais il ne faut pas se contenter d'abroger mais proposer un vrai projet ambitieux, donner de l'autonomie aux établissements, que ce soit un large conseil éducatif qui décide si ici on fait plus de français, là plus de maths -parce qu'apparemment il y a des endroits où les élèves sont super fort en maths et d'autres où ils sont super bons en français  ndlr-que le CE puisse recruter ses enseignants, les licencier..." Et il n'a pas ajouté qu'il fallait augmenter le temps de présence des profs mais on sait ce qu'il en pense...
Et ce matin "le vrai faux de l'info" consacré aux propos d'Alain Juppé disant que les lycéens français ont 20 à 30% de cours en plus que les pays qui cartonnent à Pisa. La chroniqueuse dit "c'est faux, en Chine, Singapour etc, ils sont sensiblement plus d'heures de cours et encore on ne compte pas les cours en plus que se paient les élèves pour réussir. Comme quoi on ne peut pas réussir sans travailler"  Mais deuxième partie du discours: "le taux de suicide étant très élevés dans les pays asiatiques cités, il faut plutôt se tourner vers les pays d'Europe qui réussissent. Elle cite l'Allemagne (ah bon elle réussit l'Allemagne) et pays scandinaves où les profs sont plus présents, mieux investis (elle oublie curieusement de dire mieux payés)". Bon sang mais c'est bien sûr! Comme on ne peut quand même pas demander aux élèves de France de travailler plus pour réussir, on va demander aux profs qui sont responsables du désastre! Et surtout ces salauds d'agrégés! Désespérant...

Iphigénie a écrit:Pour entrer à l'EN: tu as un fond maso, non? :lol:

La raisonnement était le suivant : journaliste, c'est parler de ce qui s'est passé (j'étais dans un quotidien), ce qui est fini, révolu et le plus souvent triste. Les journaux parlent rarement des jolies choses.
Enseignant, c'est préparer l'avenir (pas le mien, c'est râpé) mais celui de l'avenir. Oui, l'avenir de l'avenir, les élèves quoi. C'est bien plus motivant parce que ce monde peut être beau et in fine, c'est l'idée que je veux transmettre, soit en le regardant d'une certaine manière, soit en participant à son édification. Après, chacun choisit pour s'inscrire ou non dans cette possibilité.
Mais je te rejoins : je suis maso sur un point, le fric. Et ça fait mal. Chacun ses priorités. Ce que j'ai le plus de mal à assumer, c'est que ça n'aide pas (c'est le moins qu'on puisse dire...) ma femme et mon fils.

Voilà pourquoi je m'en tiens à "la presse qui s'achète pour ne pas se vendre" (Le Canard enchaîné et la Décroissance).
Pour les informations sur "les restes du monde", les livres et la bibliothèque...
Ce que l'on voit (ou dit-on "ce qu'on voit"?) pour l'Éducation nationale se vérifie dans bien d'autres domaines (la santé publique notamment).
Et on nous rabâche le postulat parfaitement erroné de l'agent économique parfaitement rationnel et parfaitement informé...

Ilona a écrit:" La presse libre n'existe pas. Vous, chers amis, le savez bien, moi je le sais aussi. Aucun de vous n'oserait donner son avis personnel ouvertement. Nous sommes les pantins qui sautent et qui dansent quand ils tirent sur les fils. Notre savoir faire, nos capacités et notre vie même leur appartiennent. Nous sommes les outils et les laquais des puissances financières derrière nous. Nous ne sommes rien d'autre que des intellectuels prostitués ".

John Swaiton, l'éditeur du New York Times, lors de son discours d'adieu.

Voilà un homme sur le départ qui trouva la force de dire,il y a bien longtemps,ce que sont beaucoup de journalistes.
Pour cette raison,j'ai abandonné la télévision et finalement je ne m'en porte pas plus mal.
Plus personne pour me prescrire des émotions,me délivrer du prêt à penser,davantage  de temps utilement employé etc.

-   :art:    Mais il en faut, pourtant, des journalistes.
- Je voulais déjà te le dire en lisant un post (je ne sais plus lequel) auquel tu participais : j'adore ton avatar (l'expression du chaton...)

Bon sinon les journalistes pourraient avec profit lire le fil" évaluer les compétences": c'est une très bonne analyse de l'usine à gaz qu'on est en train de peaufiner :lol:
Coucou Musa!

@Petitfils: merci, intéressant, cela confirme ce qu'on constate: il y a des parodies de débats en France, surtout parce que les médias/journalistes ne sont pas à la hauteur ou que le système est verrouillé. Je m'en suis rendu compte de façon claire aux tristes moments des attentats, j'avais vraiment trouvé que les débats étaient profondément creux voire même presque inexistants sur les vrais sujets, que les mots "liberté, égalité, fraternité, laïcité" étaient rabâchés inutilement (qui croit encore à l'égalité?). Donc pour l'EN, je n'ai pas d'espoir que le débat dans l'opinion publique soit de qualité, vraiment pas.

@Iphigénie: merci pour le fil, je l'ai ouvert car pour moi, c'est le paradigme ultime de ce que les pédagogistes ont commis, cela décrit très bien la confusion dans laquelle on est, à mon avis.

En même temps c'est europe1, c'est un peu comme lire le figaro. Pas de surprise.

çà veut dire un pays d'Europe qui réussit ? Il se garde bien de regarder l'ensemble des paramètres quand ils en parlent donc pffff !

Al9 a écrit:En même temps c'est europe1, c'est un peu comme lire le figaro. Pas de surprise.

çà veut dire un pays d'Europe qui réussit ? Il se garde bien de regarder l'ensemble des paramètres quand ils en parlent donc pffff !

Certes! Mais c'est ça le paradoxe: les libéraux sont pour l'instauration d'un système totalitaire pour "gérer" et éduquer leurs gosses!
Enfin leurs gosses....:totalitarisme dans lequel par contre ils ne veulent plus mettre leurs enfants bien sûr: l'ordre absurde c'est bien mais pour les autres.

Al9 a écrit:En même temps c'est europe1, c'est un peu comme lire le figaro. Pas de surprise.

Tu préfères France Inter ou Le Monde ? Ces médias sont devenus la voix officielle du gouvernement...

Ce matin , Sarkosy a répété 3 fois que les professeurs travaillaient 6 mois de l'"année sur France Inter .... et personne ne l'a contredit !

Il exagère, tout le monde sait bien qu'on ne travaille qu'1 mois par an.