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Gargantua
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par Gargantua 17/05/16, 04:49 pm
Bonjour,

Je suis en train de faire un commentaire analytique des "Effarés" de Rimbaud. Peut-on parler ici d'hypotypose (qui par définition est la représentation d'un tableau vivant ou dynamique) alors que dans ce poème la description est plutôt statique ?

Merci de m'avoir lu.
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par NLM76 25/05/16, 08:18 am
Hypotypose si l'on veut; pour ma part je trouve que ce mot sonne comme le nom d'une maladie contagieuse. Je lui préfère le terme transparent de "tableau vivant", qui présente l'avantage de laisser moins prise aux discussions byzantines pour s'intéresser concrètement à l'effet produit par le poème. Quel tableau Rimbaud peint-il ? Comment le peint-il ?

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«Boas ne renonça jamais à la question-clé : quelle est, du point de vue de l'information, la différence entre les procédés grammaticaux observés ? Il n'entendait pas accepter une théorie non sémantique de la structure grammaticale et toute allusion défaitiste à la prétendue obscurité de la notion de sens lui paraissait elle-même obscure et dépourvue de sens.» [Roman Jakobson, Essais de linguistique générale, "La notion de signification grammaticale selon Boas" (1959)]
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par nitescence 25/05/16, 08:51 am
L'hypotypose concerne un tableau statique. Quand il y a mouvement, animation, on parle de diatypose.

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par NLM76 25/05/16, 08:59 am
Voilà l'inconvénient des mots grecs en français : ils se prétendent univoques et invitent à des pinailleries sans fin.

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par doctor who 25/05/16, 09:03 am
Rimbaud avait-il le terme "hypotypose" en tête quand il a écrit ce poème ?
Ou plutôt, est-il nécessaire qu'il l'ait eu en tête ? Et le lecteur ?

Je pense que non, et qu'on peut donc complètement ce passer de cette catégorie pour aimer et analyser ce beau texte.

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par nitescence 25/05/16, 09:07 am
doctor who a écrit:Rimbaud avait-il le terme "hypotypose" en tête quand il a écrit ce poème ?
Ou plutôt, est-il nécessaire qu'il l'ait eu en tête ? Et le lecteur ?

Je pense que non, et qu'on peut donc complètement ce passer de cette catégorie pour aimer et analyser ce beau texte.

Nous n'etudions pas ce que Rimbaud pensait (nous n'en savons rien), mais ce qu'il a écrit. Et si cette hypotypose figure dans le texte, pourquoi n'en rien dire ? L'analyse des figures de style est un excellent moyen de rentrer dans le texte et les élèves adorent les mots compliqués.

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par NLM76 25/05/16, 09:08 am
En revanche travailler à construire le lien entre les mots et les images pour nos élèves est essentiel. Ma lecture récente de la Rhétorique à Hérennius me l'a rappelé à propos de la mémoire. Notre travail consiste en grande partie à leur montrer comment un lecteur fait pour voir ce que disent les mots.


Dernière édition par nlm76 le 26/05/16, 09:11 pm, édité 1 fois

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par doctor who 25/05/16, 10:08 am
nitescence a écrit:
doctor who a écrit:Rimbaud avait-il le terme "hypotypose" en tête quand il a écrit ce poème ?
Ou plutôt, est-il nécessaire qu'il l'ait eu en tête ? Et le lecteur ?

Je pense que non, et qu'on peut donc complètement ce passer de cette catégorie pour aimer et analyser ce beau texte.

Nous n'etudions pas ce que Rimbaud pensait (nous n'en savons rien), mais ce qu'il a écrit. Et si cette hypotypose figure dans le texte, pourquoi n'en rien dire ? L'analyse des figures de style est un excellent moyen de rentrer dans le texte et les élèves adorent les mots compliqués.

Vieux débat.
Selon moi, difficile de ne pas postuler son fabricateur quand on analyse un texte.
Mais même si ce n'est pas le cas, je maintiens que le terme est inutile (Mais nous semblons en désaccord quant à l'utilité heuristique des figures de style. Ceci explique cela.)

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par Gargantua 25/05/16, 05:25 pm
"'L'hypotypose peint les choses d'une manière si vive et si énergique qu'elle les met en quelque sorte sous les yeux, et fait d'un récit ou d'une description, une image, un tableau, ou même une scène vivante. FONTANIER" extrait du dictionnaire Gradus.

J'ignore si cette définition s'applique au texte de Rimbaud.

Certes, vivant ne veut pas forcément dire animé. Mais je ne suis même pas sûr que l'on puisse parler de caractère vivant dès lors que les enfant sont "blottis", transis par le froid et qu'ils sont victimes d'une sorte de sidération devant la fabrication du pain. C'est pourquoi  je n'ai pas évoqué l'hypotypose avec les élèves, ni même l'idée d'un tableau vivant.

Merci en  tous cas pour vos réponses, toutes intéressantes. Elles  ont un peu tardé à venir mais elles sont venues.
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par Serge 25/05/16, 05:35 pm
Une minute de plus, et ils se faisaient tirer les oreilles :lol:

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par e-Wanderer 26/05/16, 04:40 pm
nitescence a écrit:L'hypotypose concerne un tableau statique. Quand il y a mouvement, animation, on parle de diatypose.
Humm… Ça c'est de la réinterprétation moderne…

En rhétorique classique, il y a deux aspects dans l'hypotypose : l'effet-tableau, naturellement, (et typiquement tableau animé, car ça renforce l'effet de présence visuelle) mais aussi la recherche du pathétique (pitié, colère, indignation etc. chez l'interlocuteur). Sinon toute description vaguement ornée serait une hypotypose et on pourrait parler d'hypotypose à chaque page de Proust. C'est ce deuxième aspect qu'oublient beaucoup de manuels de rhétorique actuels, qui souvent se contentent de reprendre Fontanier (lequel n'est déjà plus très classique) sans relire de près Quintilien ou les rhéteurs du Grand Siècle. L'exemple typique, c'est le récit de Théramène dans Phèdre, avec le côté très visuel du récit, mais aussi la volonté de susciter la pitié de Thésée (et du spectateur).

La différence entre hypotypose et diatypose est une question de concentration (du point de vue de la longueur du "tableau", mais surtout de la recherche de l'intensité expressive (ce qui réserve, par exemple, certains types descriptifs, comme ceux qui procèdent par séries ou énumérations, à l'hypotypose).

Deux petites références :

Perrine Galand-Hallyn,, « De la rhétorique des affects à une métapoétique: évolution du concept d’enargeia », H. F. Plett (éd.), Renaissance-Rhetorik, Berlin, De Gruyter, 1993, p. 244-265.

Francis Goyet, « De la rhétorique à la création : hypotypose, type, pathos », in J. Gayon, J.-C. Gens et J. Poirier (éd.), La Rhétorique : Enjeux de ses résurgences, Paris, Ousia, 1998, p. 46-95.
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