- virgereNeoprof expérimenté
Bonjour
Mon titre est provocateur, je sais, c'est pour rameuter les foules (mode BFM activé ^^)
Après vos cours de langue, un peu de civi.
Mon cours porte sur les débuts de la République (de -509 à -133), période quelque peu ...agitée.
Parmi tous les personnages, Caton l'Ancien me semble être présenté comme un homme détestable, extrémiste, belliqueux et extrême-nationaliste. Ainsi, j'ai du mal à lui pardonner (bien que ça ne l'empêche pas de reposer en paix et c'est tant mieux) son mantra "Delenda est Carthago" et la destruction totale de la ville en -146.
Par ailleurs, il m'est présenté comme le fondateur du romanocentrisme.
Enfin, il semble avoir été particulièrement hostile à l'hellénisme et à tout ce qui n'était pas purement romain, très attaché aux valeurs traditionnelles et d'une austérité totale.
Le tout me le rend antipathique au possible, voire le plus antipathique des personnages de la période.
Toutefois, Jerphagnon est plus modéré, et explique par exemple que Caton réagissait au luxe qui envahit alors Rome, à la paresse, à l'indolence et au luxe qui se répandirent suite à l'arrivée massive des esclaves qui éloignèrent alors le Romain de ses tâches ancestrales.
J'aimerais bien, si le sujet vous intéresse, avoir votre avis sur ce personnage : détestable ou pas, finalement ?
(et pardon si la question vous paraît naïve et/ou stupide : je n'en suis qu'à la découverte de Rome et de son histoire)
Au plaisir de vous lire !
Mon titre est provocateur, je sais, c'est pour rameuter les foules (mode BFM activé ^^)
Après vos cours de langue, un peu de civi.
Mon cours porte sur les débuts de la République (de -509 à -133), période quelque peu ...agitée.
Parmi tous les personnages, Caton l'Ancien me semble être présenté comme un homme détestable, extrémiste, belliqueux et extrême-nationaliste. Ainsi, j'ai du mal à lui pardonner (bien que ça ne l'empêche pas de reposer en paix et c'est tant mieux) son mantra "Delenda est Carthago" et la destruction totale de la ville en -146.
Par ailleurs, il m'est présenté comme le fondateur du romanocentrisme.
Enfin, il semble avoir été particulièrement hostile à l'hellénisme et à tout ce qui n'était pas purement romain, très attaché aux valeurs traditionnelles et d'une austérité totale.
Le tout me le rend antipathique au possible, voire le plus antipathique des personnages de la période.
Toutefois, Jerphagnon est plus modéré, et explique par exemple que Caton réagissait au luxe qui envahit alors Rome, à la paresse, à l'indolence et au luxe qui se répandirent suite à l'arrivée massive des esclaves qui éloignèrent alors le Romain de ses tâches ancestrales.
J'aimerais bien, si le sujet vous intéresse, avoir votre avis sur ce personnage : détestable ou pas, finalement ?
(et pardon si la question vous paraît naïve et/ou stupide : je n'en suis qu'à la découverte de Rome et de son histoire)
Au plaisir de vous lire !
- SphinxProphète
Il faut voir aussi ce que sont les mentalités et l'éducation de l'époque : Caton l'ancien avait peu de chances de devenir un hippie gauchiste valoriser la guerre, placer Rome au-dessus de tout, rejeter le luxe surtout s'il est étranger et préférer une vie frugale à pousser la charrue, c'est ce qui fait un bon Romain. Personnellement, je préfère un Caton rigoureusement honnête et agissant pour l'intérêt collectif qu'un Marius ou un Sylla lançant des proscriptions pour asseoir son intérêt personnel.
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An education was a bit like a communicable sexual disease. It made you unsuitable for a lot of jobs and then you had the urge to pass it on. - Terry Pratchett, Hogfather
"- Alors, Obélix, l'Helvétie c'est comment ? - Plat."
- LeodaganFidèle du forum
Toutes les raisons évoquées plus haut ne me le rendent pas détestable: sans "romanocentrisme", il n'y aurait pas eu de civilisation romaine. Sans élimination de Carthage, Rome était condamnée à être malmenée. Raser une ville n'a rien de reluisant, disons qu'il a joué son rôle de realpolitiker romain.
Le rejet de l'hellénisme, c'est le rejet de la mode grecque du 2ème siècle: caricature (faite par les Romains) de luxe, de délégation des tâches, d'individualisme, dirait-on aujourd'hui.
Rejeter la doctrine de Caton au nom de la lutte contre le nationalisme est anachronique. Notre rejet du nationalisme date d'il y a 60 ans pour des crimes précis qu'on ne peut pas imputer à n'importe quelle doctrine "nationaliste" à n'importe quelle époque.
Le rejet de l'hellénisme, c'est le rejet de la mode grecque du 2ème siècle: caricature (faite par les Romains) de luxe, de délégation des tâches, d'individualisme, dirait-on aujourd'hui.
Rejeter la doctrine de Caton au nom de la lutte contre le nationalisme est anachronique. Notre rejet du nationalisme date d'il y a 60 ans pour des crimes précis qu'on ne peut pas imputer à n'importe quelle doctrine "nationaliste" à n'importe quelle époque.
- henrietteMédiateur
Oui, moi aussi.Sphinx a écrit:Il faut voir aussi ce que sont les mentalités et l'éducation de l'époque : Caton l'ancien avait peu de chances de devenir un hippie gauchiste valoriser la guerre, placer Rome au-dessus de tout, rejeter le luxe surtout s'il est étranger et préférer une vie frugale à pousser la charrue, c'est ce qui fait un bon Romain. Personnellement, je préfère un Caton rigoureusement honnête et agissant pour l'intérêt collectif qu'un Marius ou un Sylla lançant des proscriptions pour asseoir son intérêt personnel.
Caton incarne aux yeux des romains les vertus essentielles du citoyen, l'homme parfaitement intègre, attaché aux valeurs et au mode de vie ancestraux.
Il est dans la ligne droite des grands héros de la République, les Lucius Junius Brutus, Cincinnatus et autre Atilius Regulus. A ce titre, il fait un peu figure d'exception, même dans les yeux de ses contemporains, à une époque où ces vertus sont largement dépassées (mais elles ont sans doute été largement idéalisées, mythifiées en quelque sorte), où l'intérêt personnel a pris le pas sur l'intérêt collectif.
C'est une sorte de vieux troglodyte, je trouve.
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"Il n'y a que ceux qui veulent tromper les peuples et gouverner à leur profit qui peuvent vouloir retenir les hommes dans l'ignorance."
- SphinxProphète
Oui, exactement. Les Scipions étaient plus brillants, les Gracques étaient plus sympa, mais il avait ses qualités aussi, le vieux ronchon
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- virgereNeoprof expérimenté
(Sphinx, tu triches : je parlais des hommes de la période donnée ^^)
En fait, c'est son "jusqu'au-boutisme", son extrémisme qui me le rend antipathique, même si effectivement il m'est difficile de ne pas le regarder depuis mes filtres, mon époque.
Et, mais c'est aussi sans doute lié à la présentation faite par mon cours, il a moins d'aura que des héros comme Cincinnatus, Regulus et consorts.
En fait, à part son mantra et son traité d'agriculture (pas très objectif sur la vraie vie à la campagne, un Rousseau avant l'heure ^^), je ne connais rien de lui. Il me paraît par exemple moins légitime qu'un Scipion qui, lui, a mouillé la chemise.
Mais j'entends bien qu'il a parlé (agi ?) d'après son époque.
Je vais creuser le personnage, cela me parait nécessaire.
En fait, c'est son "jusqu'au-boutisme", son extrémisme qui me le rend antipathique, même si effectivement il m'est difficile de ne pas le regarder depuis mes filtres, mon époque.
Et, mais c'est aussi sans doute lié à la présentation faite par mon cours, il a moins d'aura que des héros comme Cincinnatus, Regulus et consorts.
En fait, à part son mantra et son traité d'agriculture (pas très objectif sur la vraie vie à la campagne, un Rousseau avant l'heure ^^), je ne connais rien de lui. Il me paraît par exemple moins légitime qu'un Scipion qui, lui, a mouillé la chemise.
Mais j'entends bien qu'il a parlé (agi ?) d'après son époque.
Je vais creuser le personnage, cela me parait nécessaire.
- virgereNeoprof expérimenté
Sphinx a écrit:Oui, exactement. Les Scipions étaient plus brillants, les Gracques étaient plus sympa, mais il avait ses qualités aussi, le vieux ronchon
Il faut donc que je creuse davantage les qualités, mais c'est un peu mon ressenti que tu exprimes, Sphinx
- Presse-puréeGrand sage
Disons que sa pensée politique a été simplifiée et souvent caricaturée pour permettre une compréhension facile et immédiate des tensions sociales et politiques de la période. Par exemple, il n'aimait pas les grecs mais parlait très bien cette langue. Les pages les plus nuancées que j'ai pu lire à son sujet sont dans le Montanelli (Histoire de Rome, aujourd'hui épuisé):
"Personne n'eut d'une façon plus vive que lui le pressentiment de la décadence de Rome [NDPP: notion remise en question aujourd'hui, le Montanelli a 70 ans], et personne ne diagnostiqua mieux que lui le foyer de l'infection: la Grèce. Il avait étudié la langue grecque: cultivé, averti comme il l'était sous ses grossiers vêtements, il avait compris que la culture hellénique était bien trop supérieure, bien trop raffinée pour ne pas corrompre [NDPP: là encore, vision un peu datée à remettre en question] la culture romaine. (...) C'est probablement cette terreur qui a dû lui suggérer l'insistance qui l'a rendu célèbre, celle du Delenda est Carthago. Plutôt qu'à empêcher une renaissance de la cité phénicienne, il visait à distraire Rome de conquérir la Grèce. Il voulait que sa patrie regardât vers l'Occident et non pas vers l'Orient, d'où ne pouvaient venir, à son idée, que des malheurs."
Cette dernière idée est séduisante, mais n'est pas prouvable historiquement.
Je remarque d'ailleurs, mais je me trompe peut-être, qu'il n'existe pas de bio de Caton. C'est pourtant un personnage historique dont on a des textes. Mais il est figé dans une grille de lecture qui ne fait peut-être pas honneur à la profondeur de sa pensée.
"Personne n'eut d'une façon plus vive que lui le pressentiment de la décadence de Rome [NDPP: notion remise en question aujourd'hui, le Montanelli a 70 ans], et personne ne diagnostiqua mieux que lui le foyer de l'infection: la Grèce. Il avait étudié la langue grecque: cultivé, averti comme il l'était sous ses grossiers vêtements, il avait compris que la culture hellénique était bien trop supérieure, bien trop raffinée pour ne pas corrompre [NDPP: là encore, vision un peu datée à remettre en question] la culture romaine. (...) C'est probablement cette terreur qui a dû lui suggérer l'insistance qui l'a rendu célèbre, celle du Delenda est Carthago. Plutôt qu'à empêcher une renaissance de la cité phénicienne, il visait à distraire Rome de conquérir la Grèce. Il voulait que sa patrie regardât vers l'Occident et non pas vers l'Orient, d'où ne pouvaient venir, à son idée, que des malheurs."
Cette dernière idée est séduisante, mais n'est pas prouvable historiquement.
Je remarque d'ailleurs, mais je me trompe peut-être, qu'il n'existe pas de bio de Caton. C'est pourtant un personnage historique dont on a des textes. Mais il est figé dans une grille de lecture qui ne fait peut-être pas honneur à la profondeur de sa pensée.
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Homines, dum docent, discunt.Sénèque, Epistulae Morales ad Lucilium VII, 8
"La culture est aussi une question de fierté, de rapport de soi à soi, d’esthétique, si l’on veut, en un mot de constitution du sujet humain." (Paul Veyne, La société romaine)
"Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres". La Boétie
"Confondre la culture et son appropriation inégalitaire du fait des conditions sociales : quelle erreur !" H. Pena-Ruiz
"Il vaut mieux qu'un élève sache tenir un balai plutôt qu'il ait été initié à la philosophie: c'est ça le socle commun" un IPR
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Sur l'agriculture, Caton n'a rien d'un bon vieux romain poussant la charrue : son Traité explique comment tirer le plus de fruit d'une de ces grandes exploitations remplies d'esclaves qui fleurissent alors au détriment des paysans libres... Aussi je doute fortement de la "vie frugale" de Caton. Enfin il faudrait voir ce qu'il faut entendre par là.
- SphinxProphète
virgere a écrit:(Sphinx, tu triches : je parlais des hommes de la période donnée ^^)
En fait, c'est son "jusqu'au-boutisme", son extrémisme qui me le rend antipathique, même si effectivement il m'est difficile de ne pas le regarder depuis mes filtres, mon époque.
Et, mais c'est aussi sans doute lié à la présentation faite par mon cours, il a moins d'aura que des héros comme Cincinnatus, Regulus et consorts.
En fait, à part son mantra et son traité d'agriculture (pas très objectif sur la vraie vie à la campagne, un Rousseau avant l'heure ^^), je ne connais rien de lui. Il me paraît par exemple moins légitime qu'un Scipion qui, lui, a mouillé la chemise.
Mais j'entends bien qu'il a parlé (agi ?) d'après son époque.
Je vais creuser le personnage, cela me parait nécessaire.
Caton a aussi "mouillé la chemise" : il a eu le triomphe sur l'Espagne comme proconsul, au terme d'une carrière militaire parfaitement honorable. Comme censeur aussi : c'est peut-être un boulot moins prestigieux à nos yeux de devenir le Censeur que de devenir l'Africain, mais tout le monde ne parvenait pas à s'y faire élire (et à mes yeux, ça a l'air d'un boulot extrêmement gonflant pour type extrêmement dévoué :lol:)
Presse-purée a écrit:Disons que sa pensée politique a été simplifiée et souvent caricaturée pour permettre une compréhension facile et immédiate des tensions sociales et politiques de la période. Par exemple, il n'aimait pas les grecs mais parlait très bien cette langue. Les pages les plus nuancées que j'ai pu lire à son sujet sont dans le Montanelli (Histoire de Rome, aujourd'hui épuisé):
"Personne n'eut d'une façon plus vive que lui le pressentiment de la décadence de Rome [NDPP: notion remise en question aujourd'hui, le Montanelli a 70 ans], et personne ne diagnostiqua mieux que lui le foyer de l'infection: la Grèce. Il avait étudié la langue grecque: cultivé, averti comme il l'était sous ses grossiers vêtements, il avait compris que la culture hellénique était bien trop supérieure, bien trop raffinée pour ne pas corrompre [NDPP: là encore, vision un peu datée à remettre en question] la culture romaine. (...) C'est probablement cette terreur qui a dû lui suggérer l'insistance qui l'a rendu célèbre, celle du Delenda est Carthago. Plutôt qu'à empêcher une renaissance de la cité phénicienne, il visait à distraire Rome de conquérir la Grèce. Il voulait que sa patrie regardât vers l'Occident et non pas vers l'Orient, d'où ne pouvaient venir, à son idée, que des malheurs."
Cette dernière idée est séduisante, mais n'est pas prouvable historiquement.
Je remarque d'ailleurs, mais je me trompe peut-être, qu'il n'existe pas de bio de Caton. C'est pourtant un personnage historique dont on a des textes. Mais il est figé dans une grille de lecture qui ne fait peut-être pas honneur à la profondeur de sa pensée.
Il me semble aussi que c'est lui qui a lancé la carrière d'Ennius à Rome.
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Sur l'agriculture, Caton n'a rien d'un bon vieux romain poussant la charrue : son Traité explique comment tirer le plus de fruit d'une de ces grandes exploitations remplies d'esclaves qui fleurissent alors au détriment des paysans libres... Aussi je doute fortement de la "vie frugale" de Caton. Enfin il faudrait voir ce qu'il faut entendre par là.
Évidemment, la vie frugale d'un propriétaire terrien de bonne famille n'est pas la vie frugale d'un esclave ou d'un chien de cynique, sinon où allons-nous je vous le demande Mais un bon propriétaire terrien doit aussi travailler et se donner du mal (voir Cincinnatus et sa charrue...)
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An education was a bit like a communicable sexual disease. It made you unsuitable for a lot of jobs and then you had the urge to pass it on. - Terry Pratchett, Hogfather
"- Alors, Obélix, l'Helvétie c'est comment ? - Plat."
- virgereNeoprof expérimenté
Merci pour vos réactions.
Il apparaît donc clairement que mon cours est incomplet : aucune mention de la carrière militaire de Caton !
Pour Ennius, mon cours indique en effet qu'il a été ramené à Rome par Caton... et qu'il l'a quitté pour Scipion, l'ingrat.
Je vais ranger mes yeux de contemporaine, et regarder d'un autre œil ce râleur austère et néanmoins admirable, en tout cas pas moins que les autres !
Il apparaît donc clairement que mon cours est incomplet : aucune mention de la carrière militaire de Caton !
Pour Ennius, mon cours indique en effet qu'il a été ramené à Rome par Caton... et qu'il l'a quitté pour Scipion, l'ingrat.
Je vais ranger mes yeux de contemporaine, et regarder d'un autre œil ce râleur austère et néanmoins admirable, en tout cas pas moins que les autres !
- LeodaganFidèle du forum
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:Sur l'agriculture, Caton n'a rien d'un bon vieux romain poussant la charrue : son Traité explique comment tirer le plus de fruit d'une de ces grandes exploitations remplies d'esclaves qui fleurissent alors au détriment des paysans libres... Aussi je doute fortement de la "vie frugale" de Caton. Enfin il faudrait voir ce qu'il faut entendre par là.
On peut tout à fait être un esclavagiste frugal !
Nb : adj. latin atypique frugi
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
On n'optimise pas son exploitation agricole sans désir de se faire des thunes, du moins je crois. Alors, ce qui m'échappe, c'est le lien entre mode de vie frugal et désir de se faire du blé.
Sur le sens de la frugalité, je pense aux élégiaques qui se disent "pauvres" parce que, ô misère, ils ne sont que rentiers...
Ah, je trouve "qui veille à ses intérêts"
Sur le sens de la frugalité, je pense aux élégiaques qui se disent "pauvres" parce que, ô misère, ils ne sont que rentiers...
Nb : adj. latin atypique frugi
Ah, je trouve "qui veille à ses intérêts"
- virgereNeoprof expérimenté
Je vais peut-être dire une çonnerie, mais je tente : je crois que de nombreuses terres n'étaient pas exploitées, que la plupart des gens visaient la capitale, et que Rome devait alors importer des céréales pour nourrir le peuple. Peut-être est-ce pour cela que Caton prônait une meilleure exploitation (plus rentable) des domaines ?
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
J'ai appris autre chose : avec les premières grandes conquêtes, le blé de certaines provinces est devenu moins cher que celui d'Italie (la mondialisation quoi), ce qui a ruiné les petits paysans dans de nombreuses régions (mais pas toutes). La seule solution pour se faire de l'argent grâce aux terres en Italie était alors de créer de grandes exploitations, et si possible polyvalentes, produire de l'huile ou du vin devenant plus intéressant que produire des choses de première nécessité. Rome a grossi entre autres parce que les paysans ruinés n'avaient plus rien d'autre à faire qu'y aller pour chercher du travail -- ou profiter de ce qu'on donnait aux gens qui n'avaient pas de travail, et qui y étaient très nombreux. Caton explique comment bien faire pour tirer un max de sa propriété, il ne s'intéresse pas aux paysans libres qu'il n'emploie pas (pour quoi faire ?) et parle des esclaves qui travaillent sur ses terres comme on parle d'animaux de ferme ou d'outils. La vue de cette Italie ne produisant plus de nourriture, et de Rome dépendante des importations (et donc de la météo marine) est ce qui frappera Tiberius Gracchus...
(Je précise que je ne suis pas spécialiste et que je dis peut-être des bêtises.)
(Je précise que je ne suis pas spécialiste et que je dis peut-être des bêtises.)
- virgereNeoprof expérimenté
Ça me rappelle quelque chose aussi.
Mais du coup, je viens de vérifier dans l'Histoire de la Rome antique de Jerphagnon :
"La petite exploitation disparut au profit de vastes latifundia où végétaient quelques colons à la tête d'armées d'esclaves. L'agriculture manquant de bras, de vastes étendues conquises et reconquises resteraient longtemps en friche, avec les conséquences que l'on devine. Il fallut notamment procéder à des importations massives de céréales pour subvenir aux besoins immédiats des populations. A Rome, l'afflux des réfugiés fuyant devant Hannibal posait un problème sérieux de surpopulation (...) Bref, à la suite de cette série épuisante de conflits, un bouleversement économique et social sans précédent affecta les structures ancestrales qui avaient fait la force de la Rome d'autrefois."
Ce qui ne veut pas dire que mon hypothèse plus haut est juste, hein, je m'en rends bien compte.
Mais du coup, je viens de vérifier dans l'Histoire de la Rome antique de Jerphagnon :
"La petite exploitation disparut au profit de vastes latifundia où végétaient quelques colons à la tête d'armées d'esclaves. L'agriculture manquant de bras, de vastes étendues conquises et reconquises resteraient longtemps en friche, avec les conséquences que l'on devine. Il fallut notamment procéder à des importations massives de céréales pour subvenir aux besoins immédiats des populations. A Rome, l'afflux des réfugiés fuyant devant Hannibal posait un problème sérieux de surpopulation (...) Bref, à la suite de cette série épuisante de conflits, un bouleversement économique et social sans précédent affecta les structures ancestrales qui avaient fait la force de la Rome d'autrefois."
Ce qui ne veut pas dire que mon hypothèse plus haut est juste, hein, je m'en rends bien compte.
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Oui, c'est ça (j'ai lu le même livre par contre je ne parviens pas à remettre la main dessus...).
- virgereNeoprof expérimenté
Du coup, notre brave Porcius Cato (le pauvre, quand même, ça vaut bien un Dick américain d'aujourd'hui ^^) a voulu rétablir la force de Rome, donc les travaux agricoles, pour lutter et contre la faim et contre l'oisiveté ?
- Sylvain de Saint-SylvainGrand sage
Caton s'adresse aux gens qui possèdent des terres et qui sont désireux d'en améliorer le rendement. S'il voulait lutter contre le chômage il expliquerait comment ne surtout pas acheter d'esclaves pour travailler sur les terres. Quant à la faim : je pense que ça lui en touchait une sans faire bouger l'autre, mais surtout je ne crois pas qu'à son époque on souffrait particulièrement de famine. On angoissait quand la tempête soufflait depuis un peu trop longtemps sur la mer et que les bateaux chargés de grain n'arrivaient plus, mais ça finissait toujours pas passer. Il y avait de la spéculation aussi (Claude, mais là mes souvenirs deviennent très nébuleux, tentera je crois de lutter contre ça). Le grain ne manquait pas.
- LeodaganFidèle du forum
Sylvain de Saint-Sylvain a écrit:On n'optimise pas son exploitation agricole sans désir de se faire des thunes, du moins je crois. Alors, ce qui m'échappe, c'est le lien entre mode de vie frugal et désir de se faire du blé.
Sur le sens de la frugalité, je pense aux élégiaques qui se disent "pauvres" parce que, ô misère, ils ne sont que rentiers...
Nb : adj. latin atypique frugi
Ah, je trouve "qui veille à ses intérêts"
"Econome, frugal, sobre, rangé, honnête." (Goelzer)
"1 frūgi, a, um (frux), [employé comme adj. indécl. et au fig.] qui est moralement de bon rapport (de bon revenu), rangé, sage, tempérant, sobre, frugal, honnête : Cic. Phil. 2, 69; Fin. 2, 90; Tusc. 3, 16; Clu. 47; frugi es Ter. Eun. 608 , tu es un brave homme ; v. frugi bonæ à frux.
#2 Frugi#
2 Frūgi, l'Honnête homme [surnom de plusieurs Romains, p. ex. L. Pison]. "
(Gaffiot)
- DimkaVénérable
C’est anachronique, comme approche (sauf si on se demande si Caton était détestable pour les gens de son époque), à supposer en plus qu’on ne parle pas de l’image de Caton fabriquée par les sources.virgere a écrit:J'aimerais bien, si le sujet vous intéresse, avoir votre avis sur ce personnage : détestable ou pas, finalement ?
_________________
- Spoiler:
- LefterisEsprit sacré
C'est ça, on ne peut pas regarder avec les mêmes lunettes un monde aux valeurs différentes, vivant dans un contexte différent. Disons que Caton ne faisait pas défaut aux valeurs auxquelles il adhérait et à l'Etat qu'il servait, dans une société où l'individu n'est ce qu'il est que par rapport à la société, à laquelle il se doit entièrement. Un peu passéiste, même à son époque, mais le courant conservateur, "vieux romain", austère , dans un monde devenu subitement immense, riche , fortement hellénisé a perduré jusqu'à la fin de la République, et reste un modèle sous l'Empire, où ça devait pourtant se raréfier. Il n'y a qu'à voir les portraits les plus flatteurs chez écrivains comme Tacite, ils sont comme ça : sens exacerbé du devoir, durs au mal, sobres...virgere a écrit:
Je vais ranger mes yeux de contemporaine, et regarder d'un autre œil ce râleur austère et néanmoins admirable, en tout cas pas moins que les autres !
Evidemment, vu avec nos yeux, et dans une société individualiste, Caton -tel qu'il nous est présenté - passerait pour infréquentable.
Mais du coup, je viens de vérifier dans l'Histoire de la Rome antique de Jerphagnon :
"La petite exploitation disparut au profit de vastes latifundia où végétaient quelques colons à la tête d'armées d'esclaves. L'agriculture manquant de bras, de vastes étendues conquises et reconquises resteraient longtemps en friche, avec les conséquences que l'on devine. Il fallut notamment procéder à des importations massives de céréales pour subvenir aux besoins immédiats des populations. A Rome, l'afflux des réfugiés fuyant devant Hannibal posait un problème sérieux de surpopulation (...) Bref, à la suite de cette série épuisante de conflits, un bouleversement économique et social sans précédent affecta les structures ancestrales qui avaient fait la force de la Rome d'autrefois."
C'est développé par beaucoup d'historiens, à juste titre. En fait la guerre dite d'Hannibal, la deuxième guerre punique, a décimé une génération, parmi laquelle beaucoup de paysans.
Mais paradoxalement, Rome, à deux doigts de disparaître, a retourné la situation en triomphant des anciens alliés d'Hannibal , comme Philippe V de Macédoine, puis Antiochos, et la paix d'Apamée rend la domination romaine extrêmement étendue, amène des richesses, transforme les structures sociales en éloignant les agriculteurs des champs pour en faire des soldats partant longtemps pour des campagnes lointaines.
Pendant ce temps, des terres restent en friche et l' ager publicus est exploité par les possédants , les riches, qui peuvent acheter les esclaves, qui affluent, et que n'avaient pas les paysans modestes , dans des exploitations familiales.
C'est d'ailleurs cette situation qui amènera les troubles civils, les Gracques, la réforme agraire, les lois fumentaires pour la plèbe urbaine chassée des campagnes.
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"La réforme [...] c'est un ensemble de décrets qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui ne prennent leur sens que quand on les voit tous ensemble"(F. Robine , expliquant sans fard la stratégie du puzzle)
Gallica Musa mihi est, fateor, quod nupta marito. Pro domina colitur Musa latina mihi.
Δεν ελπίζω τίποτα, δεν φοβούμαι τίποτα, είμαι λεύτερος (Kazantzakis).
- virgereNeoprof expérimenté
Merci de ces éclaircissements.
Les Gracques sont au programme du prochain semestre, qui va, je crois, jusqu'à la fin de la République (il ne me tarde pas d'arriver à la fin de l'Empire, ça a l'air d'être un joyeux... capharnaüm !)
Allez, je quitte Rome et file rendre visite à Solon et Clisthène !
Les Gracques sont au programme du prochain semestre, qui va, je crois, jusqu'à la fin de la République (il ne me tarde pas d'arriver à la fin de l'Empire, ça a l'air d'être un joyeux... capharnaüm !)
Allez, je quitte Rome et file rendre visite à Solon et Clisthène !
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